Je tue les enfants... rage à l'Education Nationale

Un livre qui secoue les tripes, c'est bien. Un livre qui, en plus, froisse les neurones, crénom, c'est pas mal aussi. Je tue les enfants français dans les jardins traite de l'impossibilté d'enseigner dans, ici, un collège de Marseille. Pour une fois, ce n'est pas la Seine-saint-Denis qui est dépeinte mais bien le grand port du sud, ville que l'on croit baigné de félicité parce que vivant sous le soleil. Dans son roman, Marie Neuser (enseignante par ailleurs) dépeint un quotidien de violences, d'humiliations, d'impasses éducatives. Les premières pages provoquent une certaine gêne mais aussi de la révolte. De la colère.

Lisa, prof agrégée d'italien, dévoile ses sentiments au fil des jours, " la plongée dans l'enfer de l'humiliation, c'est le châtiment que l'on réserve aux criminels dans les Etats autoritaires... On ne peut laisser une gamine de seize ans faire la pute sans réagir, même si intimement on est persuadée que c'est l'unique chose qu'elle sera capable de faire dans la vie... On nous demande de modeler ces merdes avec une abnégation dont tout le monde se contrefout... " Des états d'âme mais pas seulement : Lisa se confronte à une hostilité qui ira jusqu'à l'agression physique en classe même. Forcément cela interpelle la conscience de celle qui se rêvait comme passant le flambeau de la culture, des idéaux républicains, à l'image de son père, enseignant à la retraite. Et lorsque la jeune Samira, seule gamine, qui, dans cette classe, veut s'en sortir, se suicide, Lisa voit basculer sa réalité et grossir une vraie haine dans son ventre, en même temps qu'un bébé...

Un premier roman provocateur qui se lit d'une traite. On attend impatiemment le suivant sur lequel Marie Neuser travaillerait déjà. A noter, donc, le retour de cet éditeur, L'écailler, successeur de L'écailler du sud, avec François Thomazeau (Qui a noyé l'homme grenouille ?) aux manettes et le soutien de l'éditeur corse Albiana.

Je tue les enfants français dans les jardins, ed. L'écailler, 164 pages, 16 euros.