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The killer inside me

Littérature noire

Bad Chili : Hap et Leonard sur la trace de snuff movies

Hap était planteur de roses (lire L'arbre à bouteilles), le voilà ouvrier pour l'industrie du pétrole, avant d'être peut-être branleur de poulets, puis videur. Dans l'East Texas, la vie n'est pas une route qui sent le jasmin. Pour couronner le tout, un écureuil porteur de la rage lui plante un sauvage coup de dents dans le bras ! Là, ça fait beaucoup. Mais que dire de Leonard qui vient d'être largué par son petit copain Raul, parti avec un vulgaire biker surnommé Braquemard ? Lequel vient d'être découvert sur le bord d'une route, le visage délicatement rectifié au fusil de chasse. Sur son lit d'hôpital, attendant sa piqûre antirabique, Hap apprend que le motard en question était un flic infiltré...
Toujours aussi dingue, toujours aussi drôle, dans Bad Chili (troisième aventure qui est en fait la quatrième pour ceux qui ont suivi), le duo Hap et Leonard s va se coltiner des pervers homophobes, un industriel du chili con carne et un ancien catcheur professionnel, taillé comme un 38 tonnes. Ecrit en 1997, il y a est encore, en ce temps-là, question de trafic de vidéos VHS, des snuff movies dégueulasses qui s'échangent sous le manteau et contre quelques jolis billets.
Joe Lansdale confirme son talent de narrateur, emboîtant sans trembler indices, suspects et fausses pistes. C'est du classique certes mais c'est efficace au possible, l'avantage d'un duo étant de pouvoir sans cesse rebondir sur l'un ou l'autre, de garder l'histoire en mouvement. Et si ça ne suffit pas il y a Jim Bob, un détective privé de Houston, qui vient donner un coup de main.
Mais la marque de fabrique de Lansdale ce sont évidemment ses dialogues. De quoi dérider le moindre fan de death metal. "- T'as besoin d'une femme Hap. Ne serait-ce qu'une petite crampette avec une fille du coin, tu vois ? - Oh, voilà une pensée élevée. Très moderne, Charlie. - Je veux juste dire que ça fait du bien de niquer de temps en temps, ça te décongestionne l'arrière des yeux, ça te redresse le dos. Et peut-être que ça t'éclaircit le teint. - J'ai déjà un teint de pêche." Le tout nimbé d'une ironie de cow-boy, du genre mecs très fatigués par ce monde, "on y servait soi-disant de la bouffe bio - c'est à dire que la plupart des plats avaient le goût d'une vieille merde de chien recuite et écrasée." Le tout écrit il y a 23 ans tout de même.
Bad Chili ne se prive de poser un regard dur sur la société américaine, homophobe, raciste où le pognon bien mal acquis sera toujours, et magré tout, du pognon. Joe Landale ne joue pas pour autant les pères la morale, sa série est celle de deux gars qui essayent de s'en sortir, autant professionnellement que sentimentalement. Il y a une fausse légèreté dans ces romans, un fin équilibre entre divertissement et critique, quelque chose de subtil. Et d'intelligent.

Bad Chili (trad. Bernard Blanc), ed. La Série Noire, 330 pages, 12 euros
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