Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
The killer inside me

Littérature noire

L'ange rouge : enquête poisseuse au coeur de Lyon

François Médéline connaît le roman noir. Il a lu des kilos de Série Noire, de Rivages, depuis sa jeunesse. Et ça fait maintenant une bonne dizaine d'années qu'il écrit. L'homme maîtrise donc les ficelles du genre. Avec L'ange rouge, l'auteur de Tuer Jupiter, s'offre son polar, tendance thriller, son roman de flics, évidemment nourri à Ellroy, dans le fond mais surtout dans la forme. Médéline ne va pas renier ses influences, encore moins les cacher.

Direction donc l'année 97 et Lyon. Alain Dubak est le patron d'une équipe de la brigade criminelle qui n'est pas en odeur de sainteté dans le service. C'est bien pour cela qu'on lui refile ce drôle de cadavre, crucifié, émasculé et la peau du visage savamment retirée. Point d'orgue, une orchidée peinte sur le corps. Le tout sur une barque qui descendait la Saöne. Une bonne mise en scène de psychopathe. Mais qui pouvait en vouloir à ce gamin, Thomas Abbe, membre d'un groupe antifa ? Dubak s'appuie sur son équipe pour retracer le parcours de la victime. Il y a Mamy, ex boxeuse, un brin en surpoids et accro aux bonbons. Il y a Véronique, une beauté, torturée par la terrible maladie de son tout jeune fils. Il y aussi Abdel, Thierry, Joseph, Laurent et le chien Russel. Tous, sauf le clebs, vont ratisser Lyon. On parle d'une copine de la victime, d'une femme remontant la Saône sur un hors bord. D'un repaire d'anarchistes dans les souterrains de la ville. Et d'une connexion avec l'école des Beaux-Arts. Dubak met toute son énergie sur ce dossier, lui, l'ancien des stups, marqué par une vielle addiction à la coke, bouscule un peu trop de monde et se fait nuitamment rectifier à la batte de base ball. Une psy vient aider l'équipe de Dubak pour tenter de dresser un profil du tueur. Et celui-ci récidive. Cette fois sur un étudiant des Beaux-Arts : émasculation, visage découpé, orchidée... les connexions se font plus nombreuses, l'équipe fouille en Amérique, chez quelques bourges du crû, l'étau se resserre.

Sur le fond donc, Médéline s'approprie les grands lignes du roman de flics à la recherche d'un tueur, du classique, donnant à lire le quotidien d'une équipe d'hommes et de femmes amochés par la vie, poursuivis par leurs démons intérieurs (la came et une femme partie pour Dubak, un mari mort pour son adjointe). En faisant de Mamy une ancienne boxeuse, glisse-t-il un clin d'oeil à Lee Blanchard et Bucky Bleichert du Dahlia ? L'ange rouge est de toute façon un clin d'oeil au Dog. Car sur la forme, c'est phrases courtes et répétitions. Du style appuyé. Un poil trop peut-être, la lecture en devient presque sans surprise et cette volonté d'écrire trop, détourne par moments de l'histoire, d'une ambiance pourtant bien poisseuse et bien installée. Comme les six pages d'écoute des cassettes : si elles donnent du réel, sonnent un poil too much. C'est le paradoxe.

Au final, François Médéline maîtrise parfaitement son intrigue, noie comme il faut toutes les pistes et se débrouille pour tenir un fil très crédible, solidement schizo. La scène dans les souterrains est ainsi particulièrement tendue, très forte. Même ces repas nocturnes chez Fernand sonnent juste, sincère. Il faut juste qu'il s'affranchisse un brin de son influence. Ou pas. C'est peut-être une façon de rendre hommage.

L'ange rouge, ed. La manufacture de livres, 506 pages, 20, 90 euros
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article