Littérature noire
30 Avril 2011
Voilà, il est arrivé. Ce nouveau Dennis Lehane. Il y a quelque chose de très personnel lorsque l'on attend ainsi le nouveau roman d'un auteur découvert à ses débuts. de cette chère Boston. Sans doute la paire la plus coriace et la plus humaine du Donc, Moonlight Mile. Ou le retour du couple Kenzie/Gennaro, le duo de détectivespaysage du roman noir. Pour Lehane, après le succès critique et publique d'Un pays à l'aube (2009), revenir ainsi au polar a sans doute plusieurs sens : montrer sa capacité à produire des intrigues plus simples et envoyer un signal à ses lecteurs. J'y reviendrais. Pour les fans de Lehane : Kenzie/Gennaro ont quelque chose des madeleines de Proust... Et si la recette est bien là, la saveur a changé.
Moonlight Mile est la suite, douze ans après, du sordide et réussi Gone, Baby, Gone. Ainsi Amanda a de nouveau disparu de chez sa toxico de mère et, une fois de plus, c'est la tante qui vient demander à Patrick Kenzie et Angie de la retrouver. Sauf que Patrick n'est plus détective. Enfin, plus à son compte. Il bosse désormais pour une discrète agence dont le fichier clients recèle presque exclusivement la riche société bostonienne. Et même si Patrick n'est pas super fier de son job, comme on dit, cela paye les factures. Car sa femme, Angie (eh oui), finit ses étude. Et leur fille (re-eh oui), Gabby, n'a que quatre ans et demie... Bref, cette histoire d'Amanda ne peut que rouvrir des plaies. Souvenons-nous qu'à l'époque, Patrick, chevalier blanc, avait repris Amanda à un couple bien sous tous rapports qui avait effectué une sorte d'adoption kidnapping. Et Amanda était repartie chez sa mère, alcoolo, toxico... Pas la super gloire en somme.
Jusque là Moonlight Mile fonctionne très bien, sur le ton d'un Clint Eastwood, dans Impitoyable. A la fin, Patrick dit clairement " ça craint de vieillir ". Car ces deux-là n'ont plus tellement le feu sacré ni le goût du risque. Par contre ils ont toujours soif de Justice. Et voient là l'occasion de rattraper, peut-être, l'erreur faite il y a douze ans.
Pour la suite, l'intrigue autour d'un trafic de nouveaux nés avec mafia russe au milieu, reste anecdotique. On regrette même certaines scènes inutilement tirées en longueur. Heureusement, Lehane est un grand romancier et un sacré dialoguiste, Moonlight Mile s'en tire donc avec une casse minimale. Et à la dernière page, on comprend finalement qu'il s'agit sans doute du 6e et dernier épisode de la saga.
Moonlight Mile, Dennis Lehane, ed. Rivages, 380 pages, 19 euros.