Christophe de Metter toujours aussi doué pour la BD de Cul-de-Sac

C'est décidément une très, très bonne habitude prise par Christophe de Metter : adapter de grands textes du polar ou du thriller en bande dessinée, dans la luxueuse collection Casterman/Rivages (sauf qu'ici, Casterman fait cavalier seul). Après le glauque et verdoyant Shutter Island, le sulfureux et carmin Scarface, voilà donc l'explosif Piège Nuptial. Pour ceux qui ont raté un épisode, il s'agit d'un des premiers romans de Douglas Kennedy, longtemps commercialisé sous le nom Cul-de-Sac avant d'être retraduit et réédité par Belfond. Avec un changement de titre au passage. Ce qui n'est évidemment pas la meilleure idée qui soit.

Mais le texte reste terrible, unique. L'histoire d'un journaliste new yorkais, qui s'offre un break dans le bush australien et tombe sur une espèce de folle, qui se le marie et l'emmène dans sa communauté consanguine, au milieu de nul part... Un cauchemar que Christophe de Metter met parfaitement en mouvement et en couleurs.

L'auteur a un talent fou. D'abord dans la qualité de ses portraits, de ses gros plans, d'une précision incroyable, d'une humanité forte. Au point que l'on se demande s'il ne part pas de photos pour faire ces portraits ! Mais il y a surtout, l'usage des couleurs qui est stupéfiant chez de Metter, des coups de pinceaux qui créent une ambiance pesante, oppressante, des jeux d'ombres et de lumières ingénieux. Dans un bar, dans un entrepôt, même dans la nuit, ce dessinateur offre une dimension nouvelle au texte, tout ce qui n'est pas dit dans les phylactères se voit là, se sent là. C'est la puissance du 9e art, son intérêt principal, quand il parvient à offrir un suppément d'âme à un roman ou un scénario déjà de grand niveau.

Alors oui, la BD est un peu chère (18 euros) mais encore une fois, c'est le mariage parfait d'un très bon livre et d'un grand auteur.

Piège nuptial, édition Casterman, 122 pages, 18 euros.