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The killer inside me

Littérature noire

Magnifique Belèm où le Brésil montre son visage de violences, de dopes... et de sexe

Magnifique Belèm où le Brésil montre son visage de violences, de dopes... et de sexe

Bon sang ! Voilà sans doute l'une des plus belles surprises de 2013. Belèm, d'Edyr Augusto, se place sans conteste dans les cinq meilleures lectures de cette année. On ne va pas faire ici le bilan des mois précédents mais Belèm a ce qu'il faut pour réveiller les papilles des lecteurs de littérature noire. Car il y a tout chez Augusto. D'abord un cadre : cette ville de Belèm, à l'embouchure de l'Amazone, peuplée de noirs, d'indiens et une hydrométrie à faire blémir les serres du Jardin des plantes... Augusto a aussi un goût sûr pour les dialogues, sans passer par les sempiternels " X dit ", " Y répond "... l'auteur sait que le lecteur va s'y retrouver et cela donne une fluidité énorme, une sorte de réalisme. Quant à l'histoire, il faut avoir le coeur bien accroché. Fini le Brésil de la samba, des joueurs de ballon rond, des jolis strings sur des fesses rebondies. Ici, c'est un petit enfer.

L'enquêteur Gilberto Castro, dit Gil, arrive sur le décès de Johnny, coiffeur gay de la jet set locale. A priori rien de bizarre. Sauf cette coupelle avec des traces de poudre blanche. Enfin, ce n'est pas non plus un sex toy dans chambre d'une nonne ! Il tombe aussi sur de vilaines vidéos pédophiles du coiffeur. Des trucs dégueu. Sans nom. Petit à petit Gil va aller à la rencontre des " amis " de Johnny, patrons de boutiques, bourgeoises, fifilles à son papa...

Edyr Augusto offre d'abord cet inspecteur au lecteur. Un personnage superbe, certes lui aussi accro à la bouteille, mais seulement et exclusivement à la bière. L'auteur contourne un peu le cliché du flic revenu de chez les AAA et s'y plonge joyeusement, dans de belles bordées à fort taux d'alcoolémie. Gil exhale la testostérone mais représente aussi une nouvelle forme de police, plus propre, moins corrompue pour tout dire.

Un brin masochiste, Augusto présente de beaux personnages, femmes ou hommes, qu'il va s'employer à torturer, à maltraiter. D'abord avec Gil mais aussi avec une adolescente du ruisseau qui rêve d'un monde meilleur, avec un footballeur star, un collègue de Gil, sans oublier Selma, bombasse juvénile, poison mortel... Le monde de Belèm est d'une sensualité extrême avec une pronographie jamais très loin, une violence sexuelle parfois insoutenable. C'est perversité, trafics de stup' et passe droits à tous les étages. Les cinquante dernières pages sont d'une sauvagerie sans nom, totalement inédites dans le polar (enfin, je pense). Il faut s'attendre à de vraies remontées de bile face à cette scène au fond de la jungle... Alors, oui, l'épilogue est très cinématographique, peut-être un poil trop happy end. Mais cela ne gâche en rien le plaisir d'une lecture ébouriffante.

Les médias ont tendance à laisser croire que la sauvagerie sur Terre est du côté, seulement, des fous de Dieu, des talibans, des tribus africaines plombées par la ganja. Non, l'Amérique du sud et l'Amérique centrale conservent une folie intense qu'Augusto sait mettre en mots. On le savait déjà grâce à des éditions Asphalte qui nous avait comblé l'an passé avec Chamamé. Belèm est dans la même catégorie : indispensable.

Belèm, d'Edyr Augusto, édition Asphalte, 251 pages, 21 euros.
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