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The killer inside me

Littérature noire

Pimp : roman culte (vraiment ?) sur le proxénétisme dans les années 50

Pimp : roman culte (vraiment ?) sur le proxénétisme dans les années 50

On appelle ça une autobiographie romancée. Iceberg Slim, maquereau de Chicago, publie, en 1969, Pimp, l'histoire de vingt ans de proxénétisme de 1938 à 1960. Tout y passe, les différentes prisons mais surtout, évidemment, les putes, des dizaines, des centaines. Un livre qui a, paraît-il, influencé (in)directement les mouvements black, voire le gangsta rap, y puisant une forme de rebellion et une inspiration face à la société blanche. Iceberg Slim, comme une sorte de mythe... Les éditions Points le ressortent ces jours-ci dans une mini collection, relookée et, justement, baptisée Polar Culte. L'occasion de le lire. Et, franchement, il y a quelque chose de gênant.

Est-ce le 21e siècle ? Est-ce l'évolution des moeurs ? Est-ce simplement une forme de morale judéo-chrétienne ? En tout cas, voire traiter des femmes comme cela, sur plus de 20 ans, cela laisse un goût amer. De toutes les mafias du monde, le proxénétisme est tout de même la plus abjecte. OK, la drogue, ce n'est pas très glorieux non plus. Et les caïds aux gros flingues, c'est pas génial. Mais bon... Et encore, Iceberg Slim se donnant le (très) beau rôle n'est surpris qu'une seule fois en train de corriger une de ses gagneuses à coups de cintres ! Il distribuera aussi un sacré crochet à une autre de ses filles. Mais on imagine aisément que dans la réalité, il n'a pas dû apporter que des fleurs à son harem, son " écurie " comme il dit. Le pire, c'est que l'on saisit mal la fascination des filles pour Slim. Beau gosse certes, qui apporte une forme de protection, du luxe aussi mais qui démarre sans rien, sans fille, sans argent, avec juste quelques conseils de Sweet, le patron des macs à Chicago, une belle dépendance au speed-ball... et une certaine misogynie. Sans doute, pour comprendre, faut-il se replonger dans l'Amérique des années 40, chez ces blacks vivant dans la misère, affrontant le racisme de la société, des flic aussi lorsqu'ils ne pouvaient pas les corrompre... En tout cas, le jeune Robert Beck, de son vrai nom, est un hommes d'affaires : " je regardai mais nouvelle montre, une Longines incrustée de diamants. Il était minuit et demi. Et voilà ! J'avais vingt ans, j'habitais un appartement à six cents dollars par mois et j'avais trois magnifiques tapineuses sur le bitume. J'avais enfin réussi à devenir un mac. "

Alors, le lecteur y apprend toutes les combines pour garder des filles, pour leur faire miroiter un avenir meilleur, de belles fringues. Et Slim, souvent écrit avec talent. Mais c'est dans la préface de Sapphire, datant de 1998, que l'on tire le meilleur, peut-être : elle y évoque cette époque des années 40, 50, 60 et surtout le combat pour les droits civiques, si violent. Mettant en parallèle, l'attitude totalement apolitique, presque nihiliste d'Iceberg Slim et les manifestations pour une meilleure démocratie. " Les Nationalistes noirs nous appelaient les reines noires et dénonçaient les mauvais traitements que les femmes noires, hispaniques ou indiennes subissaient aux mains de l'homme blanc, mais les mains qui avaient jeté dans une boîte à ordures le cadavre de Karen Small, ma meilleure amie, étaient bel et bien des mains noires. Et pendant que ces mêmes Nationalistes protestaient avec les Pan Africains contre la tendance à présenter les Noirs comme des personnages malfaisants, Iceberg décrivait un monde dont nous savions tous qu'il était bien réel. " C'est dans sa dimension historique, in fine, que peut être apprécié Pimp.

Pimp, Iceberg Slim, édition Point, 411 pages, 7, 80 euros.
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