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The killer inside me

Littérature noire

Amor, de Dominique Forma : un thriller tout en dentelles et politique française

Amor, de Dominique Forma : un thriller tout en dentelles et politique française

Soutenu par une très bonne critique sur le net et par un auteur discret et pertinent dans ses interventions, Amor, avec sa couverture sexy en diable, ne pouvait qu'attirer les amateurs de romans noirs. Car il y avait quelque chose de décalé entre cette couverture et l'éditeur, Rivages, plus habitué aux personnages, disons, habillés... qu'ils soient vivants ou morts. Mais voilà, c'est cela aussi le métier d'éditeur, prendre des risques, aller chercher le lecteur. Amor ne ressemble à rien de ce que l'on lit habituellement en littérature de genre. Enfin si, il y a cette critique acide de la société mais le discours est doublé d'une réflexion intelligente sur le couple, sa sexualité et le pouvoir. D'accord, certains y verront un clin d'oeil à l'affaire DSK mais c'est bien plus fin.

Maximilien et Camille ont quelque chose comme la quarantaine. Lui, donne des cours d'économie à la fac, elle, s'occupe de culture à la mairie de cette petite commune bourgeoise des bords de Seine. Bon, si on doit faire une critique à Forma, c'est sur le job de Camille : organiser des rencontres culturelles avec le Burkina Faso ?! On a du mal. Certes, certes, il y a encore des pseudo-intellos, tendance gaucho et pull à col roulé, qui se complaisent dans ce colonialisme d'élite mais on sent comme un règlement de compte de la part de l'auteur. Parenthèse fermée. Le couple donc vit sa vie, avec leur gamin et passe ses vacances dans une villa, sur la Côte d'Azur. C'est là que, par hasard, il croise Viviane, jeune paumée, partie en Inde où elle y a achetée un stock de breloques artisanales qu'elle revend sur des stands, à destination des touristes couvert de Monoï et de bobs. Le couple parisien lui vient en aide, puis la loge un soir d'angoisse dans sa villa. La nuit venant, sans vice, sans perversion, Viviane se glisse dans le lit de Maximilien et Camille, eux, qui depuis plusieurs mois réinventent leur sexualité. Le triolisme est comme une révélation. Pour Viviane. Mais aussi pour le couple. Ces pages de Forma sont d'une intensité, d'une sensualité magnifiques. Rien n'est vulgaire, c'est de l'érotisme pur, teinté d'amour, de satisfactions et de fantasmes.

Dans ces mêmes vacances, l'autre rencontre est plus professionnelle. C'est Delgado, un économiste de plateau télé qui veut voir Max. Le branche sur son blog, ses idées. Max est flatté. Rêve de reconnaissance. Bingo. A leur retour en région parisienne, Delgado propose carrément à Max d'être sur une liste, vaguement socialiste, aux prochaines municipales...

Forma encense la libération des moeurs, tant que le consentement y est. Il aime voir ce couple s'éclater avec Viviane. Mais il les bastonne, fait rejaillir leurs faiblesse dès qu'il s'agit d'entrevoir une once de pouvoir local. La largesse d'esprit au lit n'est pas celle que l'on retrouve face au suffrage. Cette " gauche " qui aime se montrer normale ne supporte ainsi plus d'avouer ses fantasmes privées, confondant ainsi, c'est l'époque, la vie conjugale et la vie publique. Un thriller en dentelles, un thriller politique. Et pour une fois, un thriller qui fonctionne parfaitement.

Amor, Dominique Forma, édition Rivages, 297 pages, 18 euros.
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