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The killer inside me

Littérature noire

Diaz-Eterovic ouvre les plaies de Pinochet

Le Chili. Ses fjords. Ses joueurs de foot. Ernesto Pinochet. C'est fou comme l'on apprend parfois beaucoup plus de choses à travers un bon polar qu'avec ses vieux cours d'Histoire-Géo. Avec L'obscure mémoire des armes, Ramon Diaz-Eterovic remue le passé comme une vieille soupe et fait ainsi remonter à la surface des morceaux de la dictature pas jolis, jolis. Pour son détective privé, Heredia, tout commence banalement avec cette soeur éplorée qui ne dort plus depuis que son frère, " sans histoire", s'est fait dessouder par des professionnels devant son magasin de bricolage.

Pour ceux qui ne connaissent pas Heredia, attention ! : flegme et obstination au programme. Ce quadragénaire vit seul avec son chat, prénommé Simenon, se nourrit des quelques bribes de nourriture froide pas encore attaquée par la moisissure, fume clope sur clope et, à l'occasion, se bourre la gueule. Amateur de poésie chilienne et de polars, il garde son calibre toujours à proximité. Surtout lorsqu'il s'agit de rendre bavard ces officiers du régime Pinochet qui tente aujourd'hui de se dissimuler dans la bonne société. Diaz-Eterovic nous dévoile ainsi un monde encore bien vivant au Chili, des militaires qui ont réussi à faire fortune avec le trafic d'armes à destination de la Croatie notamment. Ou dela Colombie. De vraies belles ordures qui, sous Pinochet, ne voyait aucun mal à traquer et éliminer tout type d'associations ou de syndicats trop proches des communistes. Heredia en bave pour débusquer ces misérables, à l'honneur bien mal placé. Il prend même quelques coups. Mais avec l'aide d'un privé bien moins à cheval sur l'éthique, avec le concours également d'un flic et d'un journaliste, il remonte le fil de cette drôle de pelote de laine. Surtout qu'une association de citoyens oeuvre bruyamment pour dénoncer ces bourreaux et les amener devant une Justice moins clémente qu'il y a dix ans.

Diaz-Eterovic ne pond pas le polar de l'année mais comme Sepulveda dans un autre genre, il aide à comprendre le traumatisme toujours vivace de tout un peuple, par des petits détails il dessine un anti-héros aux prises avec sa nostalgie dans une Santiago qui change sous ses yeux.

L'obscure mémoire des armes, Ramon Diaz Eterovic, ed. Métailié, 288 pages, 19 euros.
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