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The killer inside me

Littérature noire

Un café avec Henning Mankell à Antibes

Un café avec Henning Mankell à Antibes

Un après midi de février. Le téléphone sonne à la rédaction : " bonjour, ici les éditions du Seuil. Henning Mankell s'installe en partie à Antibes et il veut rencontrer un journaliste de Nice Matin. " Une fois la surprise passée, place à l'organisation d'une telle entrevue. Le rendez-vous est pris pour mardi dernier, au café Le Vieil Antibes. Henning Mankell, presse étrangère sous le bras, passe inaperçu dans une ville, il est vrai, où les sexagénaires sont plus nombreux que les bambins. Le cheveu toujours en bataille, il nous emmène à sa maison, à quelques pas, où attend Eva, son épouse, par ailleurs, fille du regretté Ingmar Bergman. Deux chaises, une table et c'est parti pour 45 minutes d'entretien débridé.

Devant un café et deux tartines de pain suédois, Mankell revient sur L'Homme inquiet, la dernière aventure annoncée de son inspecteur culte Kurt Wallander. " Je n'ai rien ressenti de spécial lorsque j'ai écrit la dernière page. Ni joie, ni tristesse. Je passe désormais à autre chose, c'était une expérience fantastique mais c'est aussi juste un travail qui s'arrête. D'ailleurs lorsque j'ai écrit l'utlime page de L'homme inquiet, j'ai appelé Eva pour lui demander d'appuyer sur la dernière touche de mon clavier. Il ne faut pas croire tout ce que l'on dit sur les liens entre un auteur et ses personnages, aussi puissant soient ces derniers. C'est aux lecteurs, en fait, de ressentir quelque chose après la fin de cette série. Wallander a été très populaire, de la Corée au Japon, parce que c'était un homme passionné dans tout ce qu'il faisait. Il avait cette histoire d'amour curieuse où malgré les femmes qu'il rencontrait il ne pouvait s'empêcher de penser à se première femme. C'était triste et magnifique... Un jour j'ai demandé à un ami médecin qu'est ce que Wallander pourrait avoir comme maladie ?... Il m'a dit : le diabète. Et ça, ça a également fait beaucoup pour la popularité de Wallander. " Consolation pour les fans de notre inspecteur, The Pyramid, le roman sorti avant L'homme inquiet mais, curieusement, pas encore publié en France, devrait sortir avant la fin de cette année.

Mankell revient ensuite sur le Salon du livre de Paris, la semaine dernière, où la littérature scandinave était l'invitée. " J'ai fait une séance de dédicaces incroyable. Pendant une heure et demi je n'ai aps arrêté de signer mes livres. A un moment donné il a fallu dire stop parce qu'il y avait toujours autant de monde dans la file. C'était touchant. Et agréable. Quant à la littérature scandinave je crois qu'il s'agit d'une coïncidence. Il y a, c'est vrai, beaucoup d'auteurs en ce moment. Mais après la Seconde guerre mondiale, c'est la littérature française qui a donné le La dans le monde littéraire, notamment grâce à Simone de Beauvoir, Camus ou Sartre. Je crois donc à la coïncidence. Ceci dit j'adore Jo Nesbo. Et aussi Sjöwall qui avec son défunt mari Whalöö ont perpétué la tradition du polar. Ce sont des classiques à mes yeux, comme Mc Bain qui les a inspirés. Ou encore Conan Doyle... Mais n'oubliez pas que le polar ne représente que 25% de tout mon travail. "

C'est peut-être la dernière fois que l'on peut ainsi parler de Wallander donc on relance son créateur, notamment sur le modèle social scandinave que son inspecteur regrette souvent dans ses aventures. " Il est vieillissant Wallander alors il regrette le temps passé, c'est classique ça aussi. Quant au modèle social... C'est une mythologie que vous vous êtes forgée. Comme pour la blonde suédoise ! C'est sûr la Suède est une bonne démocratie, on peut y critiquer le gouvernement mais ce n'est pas le paradis que vous imaginez ! D'ailleurs, j'y vois de plus en plus de pauvres. La situation ne s'améliore pas. Comme en France j'ai l'impression. "

A Antibes, Henning Mankell s'échine sur deux projets distincts. D'abord un nouveau roman, dans la lignée du Cerveau de Kennedy et des Chaussures italiennes, sur une Suédoise débarquée au Mozambique au 18e siècle, qui y a travaillé avant de disparaître comme elle est arrivée. " Il y a peu d'infos sur elle et je pense qu'elle est arrivée par ces bateaux qui voguaient d'Australie à l'Europe et faisaient halte là. "Le second projet est un script pour la réalisatrice danoise Susanne Bier (Oscar 2011 du film étranger pour In a better world) sur la vie d'Ingmar Bergman. " Je l'ai connu évidemment, à travers Eva. D'ailleurs le choix d'une maison sur la Côte d'Azur c'était aussi pour que l'on puisse travailler ensemble sans être trop loin de la Suède ou du Danemark. Au Mozambique c'est impossible pour Eva car elle doit rencontrer beaucoup de monde assez souvent. " Ce projet doit être présenté au prochain festival de Cannes en mai et ne verra sans doute le jour sur grand écran qu'à la fin de l'année 2012.

Henning Mankell doit s'envoler ces jours-ci pour les Etats-Unis afin d'assurer la promotion de L'Homme inquiet : " on rencontre les journalistes, les lecteurs. Mais j'ai demandé à avoir un jour off tous les trois jours de travail sinon j'explose." Il reviendra ensuite sur la Côte d'Azur. Pour finir ses projets. Sur sa table de travail, devant son jardin. Ou encore lors de ses promenades quotidiennes, le long des quais. Mais c'est dit : la page polar est tournée.

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