Littérature noire
25 Mai 2016
Le 16 octobre 1963, Romain Gary épouse Jean Seberg, en secret, dans le petit village de Sarrola, en Corse-du-Sud. Rarement un mariage de célébrités aura été entouré d'autant de zones d'ombres, l'information ne fuitant vers les médias que plusieurs jours après et encore, sans vraiment de détails, forçant les journalistes à user d'imagination... Pour autant cela valait-il un livre de 150 pages ? Mariage en douce, Gary & Seberg, s'efforce de reconstruire non seulement cette journée de 1963 mais aussi l'histoire du couple. Ariane Chemin, grand reporter au Monde, très attachée à la Corse, est parvenue à retrouver et rencontrer l'un des rares témoins de la cérémonie encore en vie. Peut-être même le seul. Elle en tire de belles informations qu'elle agence plus ou moins comme un roman.
Le premier problème, c'est qu'il faut déjà avoir un intérêt pour la chose maritale et pour les célébrités. C'est un peu le mal de cette société de vouloir tout savoir sur tout le monde. Et surtout sur ces people. Pourtant, on pourrait vivre sans savoir qu'un tel a prénommé son enfant comme ci, ou que celle-ci passe ses vacances là-bas. De la même manière, savoir que Romain Gary et Jean Seberg se sont mariés secrètement en Corse, il y a 53 ans, voilà une information qui ne bouleverse pas la digestion. Tout grand écrivain que fut Gary ou grande comédienne que fut Seberg (n'exagérons rien non plus). Malgré l'admiration que l'on peut porter à des auteurs, le moment de leur mariage comme celui de leur communion est d'un intérêt proche de zéro. L'histoire d'amour en elle même est à peine intéressante, on sent Gary plus homme à femmes, ravi d'avoir voler cette beauté à un compatriote, un auteur visiblement très imbu de sa personne. En tout et pour tout, l'union aura duré huit ans. Certes, les deux finiront, des années plus tard, par se suicider, donnant une autre dimension romanesque à leur ancien couple.
Soit. Après il y a la dimension littéraire de ce Mariage en douce. Et là, patatras. Si Ariane Chemin s'efforce de ne pas en faire des tonnes, cela manque de nerfs, de tripes, d'un sens de la narration. Avec toujours ce tic de journaliste de vouloir se mettre en scène.
Bref, un livre assez faible, qui relève de l'anecdotique, comme son sujet. On peut aussi féliciter les éditions Equateurs qui sur 150 pages de textes, ponctuées de nombreuses photos, ont quand même laisser passer que Los Angeles était sur la côte Est... Quitte à lire les petits secrets des people, on peut toujours se replonger dans le Sinatra de Véronique Chalmet, paru chez Rivages.
Mariage en douce, Gary & Seberg, ed. Equateurs, 151 pages, 15 euros.