Littérature noire
4 Juin 2016
Sal Cupertine est un tueur à gages de la pire (ou de la meilleure, selon du coté du flingue où on se trouve) espèce. Fidèle lieutenant de La Famille de Chicago, il vient pourtant de commettre une énorme bourde. Dans un deal de plusieurs kilos de drogue, il s'est aperçu que les types en face de lui étaient des agents du FBI. Sal a fait un massacre. Il doit disparaître fissa. La Famille le prend en charge dans la nuit, l'installe dans un camion frigorifique de viandes et l'expédie chez Bennie Savone, un mafieux de Summerline, banlieue chic et juive de Las Vegas. Chirurgie esthétique complète, apprentissage de la Torah, Sal Cupertine devient le rabbin David Cohen. Une nouvelle vie mais toujours au service du crime. Malgré l'écran de fumée et même le pseudo corps calciné, retrouvé dans une décharge, censé être le sien, l'ex-agent Jeff Hopper n'est pas convaincu. La traque commence.
Entre Mark Haskell Smith et Seth Greenland, Tod Goldberg réussit une trépidante comédie dramatique avec ce Gangster Land, bien dans l'esprit des éditions Super 8. C'est caustique, exagéré, cynique, mené à 100 à l'heure, parfois de mauvais goût, mais on ne s'ennuit pas. Le personnage de Sal/ David aux prises avec le monde hébraïque et, toujours, ses réflexes de tueur est réussi à un point inimaginable. " David était au courant qu'il faisait partie de la catégorie des méchants. Mais était-il vraiment mauvais ? Il ne le pensait pas. Taré ? Sûrement. Il avait regardé suffisamment de documentaires sur Discovery Channel pour comprendre que son cerveau ne fonctionnait pas comme celui des autres, même s'il trouvait que ceux qui dévoraient des lapins en chocolat pour fêter Pâques étaient tout aussi déséquilibrés que lui. " Gangster Land (qui se déroule curieusement en 1999, sans doute parce que c'est tiré d'une vieille nouvelle de l'auteur) est aussi l'occasion de voir les nouveaux investissements de la Pègre, à Chicago mais aussi à Las Vegas, avec les multinationales qui rachètent tout et forcent les voyous à se tourner vers l'immobilier, le business des pompes funèbres...
Encore une excellente série B, l'exemple d'une belle littérature populaire,qui souffre au coeur du livre d'un petit passage à vide, mais sans remettre en cause une histoire véritablement prenante, avec un suspense simple et efficace et tout un tas de scènes propres à faire sourire voire rire franchement. La mafia au coeur de la communauté juive de Las Vegas, c'est une idée qui vaut le détour.
Gangster Land (trad. Zigor), ed. Super 8, 458 pages, 18 euros.