Littérature noire
26 Juin 2016
En France, la nouvelle de littérature noire n'est pas morte, bien au contraire. Et on le doit, en partie, à Marc Villard, infatigable auteur du genre, qui dirige par ailleurs la belle collection Polaroid, chez In8 (Marin Ledun, Marcus Malte...). Cette fois, avec La fille des abattoirs, il compile dix nouvelles parues ces dernières années au Monde, dans des revues comme Tango ou Citrus. Mais il y a aussi une inédite, la dernière, American Gravity, magistrale descente en flèche, et en dope, du rêve hollywoodien.
Marc Villard, c'est la vie des flics virés (Chiendent), des flics dans l'impasse (Piano Solo), des femmes perdues (La route de Modesto, La cavale de Lina)... Bien sûr, l'auteur fait preuve d'un humanisme naturel, d'une empathie sincère, mais il se place d'abord du côté des victimes, des faibles et des révoltés. Pas des anarchistes, pas des rebelles de salon, mais des affamés de justice, dégoûtés de ce qu'ils doivent subir dans cette société. Il y a Serge, dans La fille des abattoirs, sans problème la plus belle nouvelle, mais il y a aussi Claudio Manetti (El Diez) qui replonge le lecteur dans le Naples du grand Maradona..Marc Villard a d'ailleurs un talent incroyable pour passer du sud de l'Italie, à Toulouse, Paris, Avignon, Tanger.
Aucune nouvelle ne se ressemble, si ce n'est par la volonté de donner une voix à des êtres humains fatigués, rincés par la vie, avec cette prose fine de Villard, jamais larmoyant, ne surlignant pas les sentiments qui explosent comme un feu d'artifice miniature dans la tête du lecteur. On peut aisément placer cette Fille de l'abattoir à côté des Derniers retranchements d'Hervé Le Corre : même puissance, même délicatesse.
La fille des abattoirs, ed. Rivages, 279 pages, 8, 80 euros.