Littérature noire
24 Novembre 2016
Est-ce le seul livre de James Ellroy sorti en France hors des éditions Rivages ? Il semble bien. LA PD's 53 est un recueil de photos du fond iconographique du musée de la police de Los Angeles. Pourquoi 1953 ? Parce que c'est une année centrale dans ce Los Angeles complètement déglingué, où la came circule parmi les stars d'Hollywood, où les moeurs se libèrent devant les caméras, où la ville se transforme, où les voitures, elles aussi deviennent plus fuselées, où le crime prospère. James Ellroy, qui n'a que cinq ans en 1953, tricote là-dessus une fiction du réel. On lit donc sa fascination pour les flics de Los Angeles et notamment le big boss William H Parker, " un théocrate qui tapait du poing, il avait une passion effrénée pour la règle austère de la loi, c'était un avocat brillant. " Le Dog a une forme de respect paternel pour cette figure historique de la lutte contre le crime. Il aime rappeler à quel point la cité était corrompue avant l'arrivée de Parker, comment ses méthodes, à la limite de cette loi, justement, ont fait reculer le banditisme.
Pour chaque photo, James Ellroy se replonge dans les archives et sort une histoire. Il y a des cadavres abandonnés et c'est l'occasion de parler d'un quartier disparu, il y a des suicides curieux et c'est aussi le moment de parler des flics qui sont sur le clichés, certains devenant des légendes, comme ceux qui ont eu à traiter le cas d'Elizabeth Short. Petit à petit le lecteur qui connaît un peu l'oeuvre de l'auteur se rend compte à quel point ces personnages, ces situations de LA PD's 53 sont familières puisqu'ils ont traversé Le grand nulle part, Le Dahlia noir bien sûr, LA Confidential... toutes ces photos participent aussi à la vision de cette ville qu'Ellroy nous a transmis.Parce qu'il ne s'agit pas que de faits divers, c'est Los Angeles qui se dévoile là aussi, ses avenues, ses habitants. La sélection de clichés ne verse heureusement pas dans le morbide. Et si Ellroy est proche de l'ordre, de ces grands flics (par la taille comme par la notoriété), il a une sorte de commisération pour les braqueurs malheureux, étalés sur le bitume, pour ces pauvres hères envoyés à la chambre à gaz et qui y échapperaient sans doute aujourd'hui. Le style Ellroy est finalement bien au rendez-vous, il ne s'embarrasse pas de formules de politesse ou de psychologie." C'est bon de vivre à LA. IL y a aussi un double programme au Ritz. Les films ? Peu importe, on est en 53, et on n'est pas des tarlouzes de cinéphiles."
LA PD's 53 est un peu plus qu'un livre anecdotique pour qui se passionne pour la carrière de James Ellroy. Le lecteur français y découvre sa chère cité comme on la voit rarement avec un texte qui est un peu plus qu'une légende photo. Appréciable.
LA PD's 53, textes de James Ellroy (trad. Jean-Paul Gratias) introduction Glynn Martin, Fantask édition, 208 pages, 25 euros.