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The killer inside me

Littérature noire

Indomptable : vengeance arrosée de rhum et de gros calibre

Duran se réveille et il a un cadavre sur lui,

de la terre tout autour et une blessure par balle dans le flanc. Visiblement, il a été enterré vivant... Vladimir (ah le bonheur de ces prénoms cubains hérités du régime soviet !) Hernandez sait comment happer son lecteur dès l'ouverture. Avec Indomptable, il prend littéralement son public par les bourses, c'est une prise violente, ferme, où le pouls s'accélère, la respiration devient saccadée. Parce que le roman, polar urbain havanais, est extrêmement rapide, rythmé, violent et court. Presque pulp et en tout cas, dans la grande tradition nord américaine de vengeance simple et efficace. Vladimir Hernandez fait tourner son héros Duran autour de la bande qui l'a trahi, il épie, il attend, il frappe, un vrai loup. Aucune pitié et pourtant le gars en question n'est pas un assassin en puissance, pas un tueur à gages. Mais il sait tenir un Colt Python, élevé par un père, ancien militaire déclassé. Pour l'heure, il sort tout juste de prison: condamné à sept ans pour avoir fourni des accès internet frauduleux à une opposition politique, il est libéré avec surprise bien avant le terme de sa peine. Et pour cause, un puissant et mystérieux protecteur lui demande de collaborer à un casse. Ses talents sont requis. Et surtout ceux de son pote informaticien, Ruben, son ami d'enfance, tombé avec lui pour cette histoire d'internet. Qui sera le cadavre le recouvrant dans la tombe...

Indomptable n'est pas un polar vraiment très cubain, puisque l'auteur ne s'appesantit pas sur la situation politique ou sociale du pays, il ne tire pas des larmes ou des slogans anti castristes. Et on le remercie puisque d'autres font cela très bien. Mais évidemment qu'il y a des signes forts : l'état de la prison d'abord puisque Hernandez raconte plusieurs épisodes du Combinado, il y a aussi la question de l'argent, entre peso cubain, peso convertible et précieux dollars (l'équivalent de l'iPhone 9 pour ces insulaires !), Duran évoque aussi la crise des balseros, les révoltes vite calmées à coups de matraques... " voilà une île aux passions bien éphémères " glisse-t-il intelligemment. Même si La Havane est le décor, il n'en fait pas véritablement son personnage comme d'autres auteurs peuvent le faire d'une ville. D'ailleurs, les scènes finales, western arrosé de rum anejo et de plomb, se déroulent dans un no man's land, un bidonville rasé par les autorités, image saisissante de cette île abandonnée, économiquement, politiquement, livrée à elle-même.

Le seul bémol, c'est de voir Zaz dans la play list finale. Et puis Duran roule en Harley, et même si on préfère Triumph pour sa classe naturelle, pourquoi la marque anglaise se retrouve-t-elle sur la couverture ? Mais c'est juste pour couper les cheveux en quatre. Superbe roman noir. Vif et enivrant. 

Indomptable (trad. Olivier Hamilton), ed. Asphalte, 246 pages, 21 €.
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