Littérature noire
22 Décembre 2017
Jim Thompson et l'alcool, ce n'est pas qu'un cliché. A l'occasion d'une réédition du Démon dans ma peau dans les années 80, son éditeur chez Lions, Arnold Hano, confiait en préface : "il avait connu de nombreuses crises d'éthylisme au cours des dites années mais il nous avait aussi assuré qu'il était maintenant au régime sec..." Lorsque le Big Jim pense à écrire Les Alcooliques, il dit à ce même Hano, "en Amérique, il y a quarante millions d'alcooliques, ça fera 40 millions de ventes". On ne sait pas si le roman a eu le succès escompté. Histoire courte puisqu'elle se déroule sur 24 heures, elle met en scène le docteur Murphy pysychiatre patron de la clinique spécialisée en cure de désintox alcoolique, El Healtho, au sud de Los Anegles. Le Doc, bien sûr a un gros problème d'argent, il lui faut 15 000 dollars rapidement où l'établissement ferme ses portes. La chance, c'est de pouvoir garder un membre d'une richissime famille de l'Est, lobotomisé "pour son bien". El Healtho n'accueille que sept patients mais il y a aussi Miss Baker, étranger infirmière, Rufus, l'infirmier noir, Joséphine, la gouvernante...
Les alcooliques pourraient ressembler à Vol au-dessus d'un ni de coucou mais hélas, c'est un peu n'importe quoi il faut l'avouer. A suivre le quotidien resserré du Doc, le lecteur est confronté à des volées de dialogues un peu dingo, des situations bizarres (l'accouchement !). Que les personnages soient bizarres bien sûr, ils sont malades. Mais par exemple, la fin du roman avec Sloane qui essaye de piéger le Doc puis de lui trouver une solution, les jumeaux qui reçoivent tout le monde dans leur chambre mais sans boire finalement... c'est assez obscure et peu inspiré. Eh oui ça arrive au plus grand. Sympathique clin d'oeil dans les dernières lignes, lorsqu'arrive un nouveau patient, écrivain (Thompson himself), le Doc conclu : "un dingue de première, Un tapé qui travaille de l'alambic. Exactement le type qu'il me faut pour écrire un livre sur cette maison."
On ne doute pas que Jim Thompson en connaissait un bout sur l'alcoolisme lourd, sur les cures en clinique. Son Doc est un pur personnage thompsonien mais l'intrigue est quasiment nulle et la description est en fait trop légère. Presque un roman bâclé.
Les alcooliques (trad. Isabelle Reinharez), ed. Rivages, 186 pages, 7 euros.