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The killer inside me

Littérature noire

Au nom du père : Maravélias revient dans un Paris futuriste

Paris, dans les prochaines années : le centre-ville n'est accessible qu'aux puissants, avec un pass. L'hyper centre est, lui, réservé à l'élite, les membres du Duché. La petite ceinture, la grande ceinture sont les territoires baptisés Zone Périphérique Intermédiaire, lieux de toutes les misères, toutes les violences, abandonnées au pire. Paris c'est désormais le carrefour George-Soros, la place Obama, tout a été rebaptisé... Dans ce décor apocalyptique, le Macédonien Dante Duzha, après avoir fuit la guerre civile, s'est construit un petit empire, s'est fait un nom dans la voyoucratie. Au point de vouloir accéder au rang de notables, d'intégrer le cercle fermé du Duché. Pour cela il compte sur l'aide de son parrain en business, Ange Pietri, homme à tout faire de ce pays en loques. Ce soir il doit justement lui remettre 600 000 euroyens, fruit des nombreux paris sur le match de boxe international qui se déroule dans quelques heures. Mais tout n'est pas si clair. Il y a d'abord son fils caché, Alkan, un neveu pour tout le monde, complètement camé, marié à la fille d'Ange Pietri mais qui fréquente en douce, Cristale, la maîtresse de Dante. Il y a Falcone, un Albanais, autrefois complice de Dante et désormais partenaire un peu obligé mais à la rancune tenace. Il y a Tony et Karsher, deux porte-flingues de Dante, chargés de récupérer l'argent des paris. Et puis Boris et Moustique, deux jeunes en galère, qui vont croiser la route de ce sombre équipage...
Il y a cinq ans, le premier roman d'Eric Maravélias, La faux soyeuse, avait secoué le petit monde du polar. Une très réaliste histoire de toxicos en banlieue parisienne, un drame puissant, qui sentait le vécu à chaque page. Avec Au nom du père, l'auteur sert toujours une image terrible de la capitale, une ville hantée par des enfants voyous, des migrants, des putes, des clodos. Une cité sale, coupée en deux, entre les puissants et les plus miséreux, où le carburant coûte une blinde, où la Milice fait flipper tout le monde, la corruption est partout, une sorte de New-York 1997, avec pluie continue et nuit sans fin. Pour cette ambiance, Eric Maravélias réussit vraiment son coup. Reste que l'histoire elle-même est un peu trop le fruit de coïncidences (les deux loustics qui tombent sur le pognon, Karsher et son fils) ou d'invraisemblances (le vol de Cristale). C'est là que ça coince parce que le roman se veut tellement ancré dans une anticipation réaliste que le lecteur a du mal à adhérer à ces passages. Il y a aussi un côté un peu too much dans la noire poésie, dans la couche de sombre sur les décors, du genre "la bise susurrait son chant funèbre". Et dernier petit détail, Pietri s'écrit sans é, c'est le privilège des noms latins, ils n'ont pas besoin d'accent.
Alors sans être aussi remarquable que La faux soyeuse, ce deuxième roman se révèle intéressant pour sa vision futuriste du pays, pour son intrigue entre grands fauves aussi. C'est plutôt ambitieux mais dommage que l'auteur ait cédé à quelques facilités.

Au nom du père, ed. La Série Noire, 374 pages, 21 euros
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M
Les critiques sont une bonne chose et elles font progresser l'auteur, c'est indéniable, mais ce que je ne comprends pas, c'est ce besoin de spoiler l'histoire. Dévoiler des éléments qui sont censés surprendre le lecteur. Ou, au minimum, être découverts au fur et à mesure de la lecture.
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