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The killer inside me

Littérature noire

Un silence brutal : la résilience et la beauté du monde

Ron Rash est revenu ! Après Par le vent pleuré, déçevant, l'auteur des Appalaches signe un roman fort, tout en drames intimes et poids de la société, dans ces montagnes de Caroline du Nord qu'il affectionne tant (ah les smoky mountains) , au pied des cours d'eau qui jalonnent déjà son oeuvre. Un silence brutal est du pur Ron Rash, alimentant le sillon qu'il a creusé depuis un Pied au paradis, une histoire de terre, une histoire de résiliences.
Les est le shérif du patelin, gros bourg rural, composé de forêts, de rivières et de truites. Le propriétaire vaniteux d'un complexe pour touristes amateurs de pêche vient se plaindre d'un vieux voisin, Gérald, un homme qui a perdu son gamin son gamin en Afghanistan et sa femme, tout aussi douloureusement. Les esprits s'échauffent entre deux hommes qui ont une vue visiblement différente de la vie dans cette Nature. Becky, amie et complice de Les, est aussi très proche de Gérald. Alors quand celui-ci est accusée d'avoir jeté du pétrole dans la rivière pour empoisonner les poissons, elle n'y croit pas une seconde. Et Les non plus. Malgré les premiers éléments...
Chaque personnages d'Un silence brutal est dessiné au pinceau, avec sa dose de souffrances intérieures, son passé, souvent lourd à porter, ses silences donc et celui de Becky dans son enfance n'est pas le moins pesant. Tout cela pourrait paraître sombre à l'extrême mais non puisque Rash glisse des moments de poésie, de contemplation une fois de plus, de cette Nature, cette faune, cette flore que l'Homme ne semble décidément pas mériter. On retrouve là les odes du Chant de la Tamassee mais aussi la bêtise humaine, toxique, les addictions que l'on croisait dans Le monde à l'endroit, une jeunesse accro à la meth, incapable de s'en sortir et plongeant les familles dans le désespoir. Et ça aussi, c'est la signature Ron Rash : les relations entre parents, les dettes des uns, les créances des autres.
En passant du Seuil à La Série Noire et en (re)créant La Noire, Marie-Caroline Aubert a donc emporté dans ses cartons un de ses auteurs fétiches. Grand bien lui en a pris, avec une traduction minutieuse, une couverture magistrale, ce sixième roman de Rash (on n'oublie pas le très beau recueil de nouvelles, Incandescences... en attendant la traduction des autres) est d'une beauté simple et limpide.

Un silence brutal (Above the waterfall, trad. Isabelle Reinharez), ed. La Noire, 257 pages, 19 euros.
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