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The killer inside me

Littérature noire

" Au départ, je m'interdisais de manier l'humour "

Pension complète passe au napalm les vacances au camping ! Vous êtes contre les vacances de prolétaires ?

Non, puisque je suis allé en camping à La Ciotat en 2016 avec femme et enfants ! C'était génial. Jusqu'à ce que des Belges débarquent et mettent de la techno à fond toute la journée sur leurs enceintes. J'ai eu envie de les buter... et puis j'ai eu l'idée du bouquin, ça m'a donné l'idée de départ. En mettant un grand bourgeois, un écrivain, au milieu de tout ça. Quand je choisis une arène, un décor, j'y vais au vitriol. Mais il n'y a pas de mépris de classe. Même s'il y a des trucs qui me mettent hors de moi quand je suis avec les prolos au camping et je ne suis pas forcément tendre. Dans mon premier livre, Mauvais coûts, je parlais de mon entreprise Alstom, je tapais sur les chefs, les membres du comité directeur, les responsables syndicaux. Et il y a un pote de la CGT, qui est à l'atelier, qui m'a balancé « tu y vas fort » ! Je lui ai dit non : je ne choisis pas de camp, j'arrose tout le monde.

Comment est venue l'idée de faire du polar mais drôle, avec cet humour noir ?

Au départ, je m'interdisais de manier l'humour. J'ai commencé à écrire à 20 ans et Mauvais coûts a été publié j'en avais 44... Entre les deux, j'ai publié un pauvre bouquin en 2008, qui n'a pas été vendu, une catastrophe industrielle. Je trouvais que la littérature devait rester sérieuse. Juste avant Mauvais coûts, je me disais, « bon, ce n'est pas pour toi l'écriture. J'en fais un dernier et si il y a des situations marrantes, des dialogues truculents, je les laisse puisque ça sort naturellement. » Et c'est ce qu'il fallait faire : j'ai envoyé le texte à un éditeur, La fosse aux ours, et il m'a rappelé au bout de cinq jours. Il m'a fallu du temps pour trouver mon style.

On a eu la banquière et le gars des cités, puis le gigolo au milieu des campeurs. L'opposition des univers, c'est votre marque de fabrique pour longtemps ?

Je ne vais pas forcément le reproduire mais c'est efficace. C'est un peu le duo Pierre Richard – Depardieu. Cela créé des situations qui ne sont pas seulement drôles, qui permettent d'interroger. Parce que je suis allé à la fac de philo, même si je ne suis pas resté longtemps, et puis de la socio. Je suis resté sur la notion d'habitus de Bourdieu : l'héritage culturel qui est la plus grosse inégalité. Qui fait que tu n'as pas les mêmes armes et que tu n'iras pas aussi loin. Sauf si tu es un joueur de foot d'exception ou un mec marrant comme Jamel Debbouze. C'est quelque chose qui me passionne. Et c'est l'histoire de ma vie, j'ai vécu dans une cité avant que ma mère se remarie avec un chercheur, j'ai connu ces deux mondes.

Où avez vous pêché cet humour ? Dans des auteurs français ou américains, genre Tim Dorsey, Jerry Stahl ?

Je ne lis pas trop d'auteurs américains dans ce créneau. En France, il y a Sébastien Gendron qui est décalé. Et aussi Sophie Hénaff, que je n'ai jamais lu, mais qui apparemment a cette touche. J'adore Iain Levison dans le genre, je suis content qu'il soit à Bastia... mais comme je ne parle pas anglais ! Sinon, j'aime les premiers Don Winslow, la série avec Neal Carey, Cirque à Piccadilly, Le miroir de Bouddha... à l'époque je m'étais dit « mais alors, on peut être marrant dans un bouquin ? » Mais franchement, je me sens plus proche de Blanche Gardin, de son univers, que d'un écrivain. Je suis entre Brel et Jacques Gardin, comme référence.

Et dans PyongYang 1071, vous écrivez pourtant « je suis psychorigide »...

Dans la vie, oui. Dans l'organisation. Au bureau on m'appelait Monk, en référence à la série. Parce que sur ma table, les stylos étaient toujours au même endroit, c'était propre, nickel, il n'y avait rien qui dépassait. Et dès que j'étais au café, ces enfoirés s'amusaient à bouger les stylos, à mettre la pagaille. Et ça me faisait marrer.

Votre rêve d'écrivain c'est quoi ?

Je suis vraiment professionnel depuis peu en fait. Grâce à deux, trois contrats dont un pour une BD chez Dargaud qui doit sortir l'an prochain. J'ai aussi un nouveau polar au Seuil en octobre 2020. Mais la vérité c'est que je veux faire du cinéma ! Je rêve de la Palme d'Or ! C'est ce que je voulais à 20 ans. Mais pas réalisateur. Plutôt scénariste ou dialoguiste. Dans ma stratégie je m'étais dit, je vais écrire des romans et un jour, il y en aura un qui sera adapté. C'est un peu plus long que prévu. Mais là je commence à avoir des touches, c'est en train de se faire. Notamment sur Demain c'est loin.

Pour revenir à PyongYang 1071, que retenez-vous de ce voyage : la dernière montée du marathon, les 30 heures de train, cette propagande molle... ?

Ah l'ultime montée, je m'en souviens bien. Mais c'est surtout le rendez-vous manqué. Mais on savait avant de partir qu'il y avait très, très peu de chances que je croise des Coréens, que j'ai une vraie relation. C'est vraiment un décor de théâtre qu'ils font défiler devant vous. On n'a jamais parlé avec un Coréen. Même si on ne nous a pas empêché ou bloqué. C'est plus subtil. Les guides, on a parlé avec eux, on a partagé des bières mais tu n'es jamais réellement avec eux. Notre guide de l'agence de voyage, elle était autrichienne, ça faisait 35 fois qu'elle venait en Corée du Nord, donc elle les connaissait les guides que nous avions mais elle n'a jamais été invitée à manger chez eux, jamais.

Vous êtes supporter de l'Olympique Lyonnais. Pas trop dur de ne rien gagner ?

Ah ah... oui, un peu. C'est un peu club d'enfants gâtés, ils jouent bien quand c'est Nantes par exemple. Notre président, il est un peu arrogant mais on a un stade magnifique, un centre de formation de niveau européen. En 30 ans, d'un club de m... il a fait une référence. J'aime bien l'idée que l'on forme tant de jeunes.

 

(interview réalisée par téléphone)

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