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The killer inside me

Littérature noire

La fureur de la rue : une vision trop soft de l'Alabama en 63

Birmingham, Alabama, mai 1963. Epicentre de la lutte pour les Droits Civiques. Martin Luther King décide de faire de cette ville, championne de la ségrégation, le théâtre de marches non violentes quotidiennes, avec des adultes puis, quand ceux-ci sont emprisonnés, avec des étudiants, des collégiens, des écoliers... C'est là que Thomas H. Cook, écrivain sudiste, plante le décor de La fureur de la rue (déjà parue à La Série Noire en 1992 sous le titre Les rues de feu).
Ben Wellman est un sergent sans histoire et surtout sans a priori raciste. Enfant de Birmingham, vétéran de la Seconde guerre mondiale,, il a, très jeune, compris que quelque chose clochait dans son Sud natal. Lorsqu'on l'appelle pour la découverte d'un cadavre dans la quartier noir, c'est parce que tous ses collègues sont en train de gérer une nouvelle manif'. Là, dans la terre d'un terrain de sport, repose une fillette de treize ans, violée et abattue d'une balle dans la tête... Au commissariat personne ne le presse pour trouver le coupable. Il y a d'autre chats à fouetter. Notamment le pasteur King dont il faut surveiller les discours. Et puis, toujours, ces manifs. Mais Wellman s'accroche. Rencontre le maquereau black du coin. Apprend que la petite fille, sourde, travaillait le week-end chez de riches blancs. Qu'un demeuré, nommé Brutus, traînait dans le coin. Que deux flics, racistes, font régner la terreur dans ce quartier.
C'est forcément un piège lorsqu'un écrivain blanc s'empare d'un sujet aussi sensible pour la communauté noire. Pour mémoire, le Ku Klux Klan avait fait sauter une église provoquant la mort de quatre enfants ! Mais Thomas H. Cook se lance avec sa bienveillance, une sorte de regard lucide sur les rapports blancs/noirs mais aussi les rapports entre noirs / noirs, certains membres de la communauté souhaitant finalement que, pour faire leur business, il est plus intéressant que les choses restent en l'état. C'est la partie la plus riche du roman. Parce que, pour le reste, on a l'impression que l'auteur gomme un peu la violence de ces journées où des bergers allemands furent jetés sur la foule de manifestants ! Avec un chef de la police, "Bull" Connor alors soutenu et élu par le puissant Ku Klux Klan. Bien sûr, Cook n'est pas là pour faire un livre politique, à charge, mais le sujet impose une prise de position un peu plus radicale, surtout quand il est écrit près de 30 ans après les faits. Aors, oui, l'histoire est bonne, l'intrigue est forte, très bien ficelée mais il y a quand même un petit goût d'inachevé, de trop gentil dans tout ça.
On préfère rester sur la très belle impression du dernier roman de Thomas H. Cook, Danser dans la poussière.

La fureur de la rue (Streets of fire, trad. Philippe Loubat-Delranc), 427 pages, 23 euros
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