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The killer inside me

Littérature noire

Une deux trois : histoires de femmes assassinées à Tel-Aviv

Pas de personnage central, pas de héros Mais des victimes. Dror Mishani, avec Une deux trois réussit le tour de force de donner totalement la parole et de rendre la vie aux femmes assassinées à Tel-Aviv par un homme quasi quelconque, avocat, marié. Il est fade à l'extrême, dans son costume pourri de tueur, et l'auteur israëlien avec une belle justesse montre à quel point les assassins sont, dans les faits, souvent sans intérêt, sinon pour la Justice. A l'inverse des femmes qu'ils tuent. Une deux trois prend le lecteur à rebrousse poil, ne lui propose pas de grande scènes de sang ou de viols. Mieux, la dernière partie offre une autre vision de l'histoire, une conclusion maline et prolixe en émotions.
Une, c'est Orna. Dévastée par son divorce et les conséquences sur son fils, neuf ans, fortement perturbé. Son ex-mari refait sa vie avec une autre femme et Orna veut se prouver finalement, qu'elle peut encore plaire. Sur un site de rencontres, elle tombe sur Guil. Elle ne s'enflamme pas. Vit ce flirt presque à reculons. Surtout qu'il a cette manie de rester une demi heure sous la douche après le sexe. Pas viril. Et puis cette  autre habitude de poser systématiquement son téléphone sous son portefeuille. Quelque chose cloche se dit Orna.
Deux, c'est Emilia. Originaire de Riga, elle est venue à Tel-Aviv comme aide aux personnes âgées. Le patient dont elle s'occupait au quotidien vient de passer l'arme à gauche et la voilà avec un contrat à mi-temps, auprès d'une femme acariâtre. Sa situation financière est difficile et demande au fils de son premier patient décédé de l'aider sur le plan juridique. Il est avocat. C'est Guil. Une drôle de relation va naître entre eux, faite de soumission et manipulation. Emilia se réfugie autant dans la religion catholique que dans l'espoir d'un avenir plus rose, pourquoi pas avec Guil...
Trois, c'est Ella. Jeune femme qui squatte tous les matins un café de Tel-Aviv pour écrire son mémoire, loin de l'agitation de son foyer. Guil la remarque, l'aborde...
Une deux trois est une formidable ode aux femmes victimes de violences, les remettant au centre du crime. Mais Dror Mishani s'extrait des clichés en proposant une histoire très forte, axée sur la psychologie des victimes, leurs failles, leur belle âme, leur courage. Des femmes de tous les jours, donc des femmes en lutte dans un monde pas si bienveillant. Il en profite aussi pour décrire quelques aspects de la vie en Israël, les habitants qui se cherchent des racines européennes pour obtenir la double nationalité, les garde malades venues par charter des quatre coins de la planète.
Très beau polar, tout en faux rythme, avec une concision qui fait tenir tout cela en 330 pages.

Une deux trois (Shalosh, trad. Laurence Sendrowicz), ed. Série Noire, 330 pages, 19 euros
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