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The killer inside me

Littérature noire

Richard Morgiève : "mon plus grand souvenir de lecture, Flicka"

C'est un mythe vivant qui a débarqué ce week end dans les jardins du musée de Bastia pour la IVe édition de Libri Mondi. Richard Morgiève, 70 ans, est de ces auteurs dont l'œuvre échappe aux cases, aux genres. Dramaturge, scénariste, un peu acteur et surtout romancier à l'insolent talent, c'est un homme qui reste insaisissable. Avant une prestation incroyable au micro, sous le feu des questions de Sébastien Bonifay, et entre deux Orezza, quelques confidences.

On ne vous attendait pas dans le polar. Le Cherokee était un pari ?
J'en ai écrit jeune mais le problème c'est qu'il y avait trop de cadres dans ce genre donc j'ai arrêté. Cette fois, j'ai voulu me faire plaisir, prendre mon pied et justement cocher toutes les cases du polar. C'était une super aventure, j'ai mis 25 mois à l'écrire. Et je me suis fait avoir parce que notamment à la fin, j'ai eu de la peine pour les personnages, j'ai été touché par l'histoire.
Votre héros, c'est Nick Corey. Pourquoi cette référence à Jim Thompson (Pottsville, 1 280 habitants) ?
Parce que c'est un homme à part. Je suis un grand fan de son autobiographie, Vaurien. Un livre énorme. J'aime sa vie. Mais en fait c'est la deuxième fois que j'utilise ce nom, je l'avais déjà fait pour United Colors of Crime.
Vos autres romans prennent d'incroyables libertés avec la forme. Pour quelles raisons ?
Je cherchais cette liberté. Je suis allé le plus loin possible dans la déstructuration, à me demander à quoi sert la virgule, à quoi sert le point-virgule ? Mais le truc fondamental, c'est l'honnêteté. Je ne fais pas des méchants pour faire des méchants. Et d'ailleurs Nick Corey c'est un méchant… mais c'est un chouette type aussi. Dans la forme, j'ai tout fait et c'est ce qui me rend heureux aujourd'hui. Mes personnages vivent réellement. On peut penser que c'est un truc d'écrivain de parler comme ça. Mais non, je les écoute et c'est comme ça qu'aux deux tiers du Cherokee, j'ai découvert que Nick Corey était homosexuel. Je ne l'avais pas prémédité. Si ça ne se passe pas comme ça, si vous n'êtes pas avec vos personnages, ça ne fonctionne pas avec vos lecteurs.
Le livre a toujours fait partie de votre vie ?
J'ai eu une enfance de vraie misère (orphelin à l'enfance, ndlr). Et de lire, ça m'a réellement sauvé : une fois les livres terminés, je restais dans l'histoire, je m'y réfugiais. C'est comme ça que j'ai survécu. Adulte, j'ai fait du débarras de cave, le peintre en bâtiment, puis le chauffeur routier avec mes propres camions, le garagiste aussi… bon, j'étais un peu escroc dans ce dernier métier. Moi je n'avais qu'un certificat d'études mais la lecture m'a toujours habité. Mon plus grand souvenir de lecture, c'est Flicka ! Je l'ai relu il n’y a pas longtemps et c'est toujours aussi bon.
Lire, ça ne paraît plus tellement intéresser les jeunes…
Je trouve déplorable ce commandement "lisez" ! Mais qu'est-ce que ça veut dire ? Si les gens préfèrent aller au foot ou regarder des filles se déshabiller ! C'est comme dire "allez au musée". Ce n'est pas parce que vous allez au musée, que vous lisez, que vous serez intelligent. Lire, oui. Mais pour faire quoi ? La culture comme habit social, je dis non. Faire lire de force, ça n'apporte rien.
Écrire, pour vous, en revanche, c'est vital.
Oui, douze mois sur douze et sept jours sur sept. Cela m'aide à vivre, ni plus ni moins. Mon prochain roman, je l'avais commencé six mois avant de finir Le Cherokee. Comme ça, je ne gamberge pas, je n'ai pas de rupture. Si je suis publié depuis 41 ans, c'est que j'ai une bonne raison de le faire et ce n'est pas pour l'argent, je ne roule pas sur l'or. Je voulais écrire depuis que j'ai 13 ans. Et aussi faire chauffeur poids lourd. Bon, j'ai fait les deux.
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