Littérature noire
7 Janvier 2021
L'idée de départ était la bonne : parler de la drogue dans les réserves amérindiennes. Le principe même était bon : évoquer la vie dans les réserves au XXIe siècle. Mais David Heska Wanbli Weiden échoue sur les deux tableaux.
Son Justice indienne souffre trop d'un manque de style, d'une écriture trop scolaire, voire de dialogues vraiment peu réalistes. Dans le désordre cela donne "Mais... où était Loco ? Pas le moindre mouvement perceptible. Il était juste derrière Nathan quand j'avais descendu son deuxième acolyte, mais il avait disparu et c'était dangereux." ou "Il y a forcément d'autres types qui parlent de nutritions aine, objectai-je". Le personnage qui parle, Virgil Wounded Horse est un Lakota, dans la réserve de Rosebud, Dakota du Sud, il n'est pas trop allé à l'école et il casse des gueules pour rendre la justice. C'est assez difficile d'imaginer qu'il objecte. Cela ne colle pas.
Pour faire court, Virgil doit sortir son neveu Nathan de la panade : il s'est fait choper avec des cachets d'oxycodine dans son casier du collège. Le gamin nie mais il risque dix piges derrière les barreaux. Seule solution, monter un traquenard avec le DEA pour piéger des dealers au coeur de la réserve. Mais question narration, cela non plus ne fonctionne pas, pour diverses raisons. La première overdose de Nathan. Pas crédible. Le personnage de Dennis, le flic. Trop superficiel. Pourtant David Heska Wanbli Heiden avait un matériau en or, qu'il ne fait qu'effleurer : le suicide des jeunes dans les réserves, il y avait là de quoi monter une sacrée histoire. Bien plus que ce crochet sur les recettes de cuisine lakota. Pour approcher, par le polar, la vie moderne des tribus sioux, cheyenne, navajos, il reste toujours Tony Hillerman ou les premiers Craig Johnson.
Justice indienne (Winter counts, trad. Sophie Aslanides), ed. Gallmeister, 412 pages, 24 euros