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The killer inside me

Littérature noire

M, l'homme de la Providence : quand Mussolini installe la dictature

" En période crise, les peuples ne veulent pas qu'on leur serve de la propagande, ils veulent qu'on les commande. Le temps des discussions inutiles doit donc s'effacer devant le temps de l'obéissance."
M, l'homme de la Providence, deuxième tome de la prodigieuse saga d'Antonio Scurati autour de la figure de Benito Mussolini. Après la violence dans les rues, dans les villes les villages et l'arrivée au pouvoir, voici la période février 1925 - octobre 1932. Un temps pour que la révolution fasciste s'incruste dans la société italienne. Mussolini confisque petit à petit tous les pouvoirs, rassemblant sous sa seule responsabilité, jusqu'à huit ministères ! En même temps qu'il supprime toute opposition à l'assemblée, excluant le moindre parti en désaccord. La sortie des députés socialistes, en novembre 1926, sous les matraques et les bâtons des chemises noires, signe, si besoin était l'avènement de la dictature. Mais Mussolini a beau éliminer la presse d'opposition, échapper à divers attentats plus ou moins rocambolesques, son vrai problème est interne. Il s'appelle Farinacci. Le patron du parti à Crémone, est devenu le patron du parti pour tout le pays. Et c'est un dur, un violent, un intrigant. Mussolini en s'en séparant, crée une poche de résistance. Pour régner, le Duce du fascisme va devoir se montrer implacable, insensible et s'enfermer dans une gestion solitaire du pouvoir. Le tout, en charmant autant Winston Churchill que le New-York Times ou le Pape Pie XI. Pendant ce temps, ses armées s'enlisent dans les sables libyens pour essayer d'exister en tant que pays colonial, à grands coups de gaz ypérite...

Rarement on a lu un tel travail historique, une telle maîtrise de l'information et de la narration, un tel équilibre dans les faits et le romanesque. Scurati donne la parole au Duce bien sûr mais également à ses "lieutenants", perclus de doutes ou moulés dans les certitudes. M, l'homme de la Providence ne laisse jamais le lecteur de côté, le roman a beau afficher plus de 600 pages, le mouvement est continu, l'action perpétuelle. Forcément, dans une période aussi trouble, agitée, violente. Oui, Benito Mussolini est un personnage de roman incroyable, une vraie crevure, un méchant diabolique, un assassin en puissance. Et un serpent politique. Les méandres de sa psychologie s'étalent au fil des pages, son double jeu, sa perversité. Mais l'auteur reste à distance, laisse le lecteur juge de la monstruosité. Ce deuxième tome confirme la puissance de cette saga, son aspect unique. A souligner : la qualité et la précision de la traduction.

M, l'homme de la Providence (M, l'uomo della Providenza, trad. Natalie Bauer), ed. Les Arènes, 625 pages, 24, 90 euros
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