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The killer inside me

Littérature noire

Rien que le noir : le prequel inespéré de Jack Laidlaw

Le projet artistique n'est pas commun : poursuivre et finir le roman d'un auteur décédé. Quand Siobhan MacIlvanney propose à Ian Rankin de finir le roman de son mari William, disparu en 2015, celui-ci s'avoue honoré. Mais il se demande aussi s'il pourra, en quelque sorte, se fondre dans le style de cet auteur qu'il admirait et dont son Rebus est, a-t-il toujours dit, le pendant à Edimbourg du Laidlaw de Glasgow. Bref, Ian Rankin s'est emparé du manuscrit inachevé et, durant le premier confinement, a écrit ce qui est aujourd'hui Rien que le noir (The dark remains). Un vrai événement pour les amateurs de littérature noire.
1972. Jack Laidlaw est un jeune chien fou de la police de Glasgow. Et un obsédé du crime. Ce jour-là, il y a Bobby Carter, le bras droit de Cam Colvin, un des plus puissants caïds de la ville, qui s'est fait suriner derrière un pub, et Laidlaw décide de prendre une chambre à l'hôtel plutôt que de rentrer chez lui auprès de a femme et de ses petites filles. Il veut être au plus près des lieux, au plus près du pouls de Glasgow. Même si c'est cette incontournable tanche d'Ernie Milligan qui est chargée de diriger l'enquête, Laidlaw, avec son nouveau camarade Bob Liley (que l'on retrouvera bien sûr dans les autres aventures), va investiguer à sa façon, en appelant ses indics, en discutant avec les différentes bandes en place, en laissant traîner ses oreilles. Personne n'avait intérêt à mettre la zizanie entre les clans. Les forces étaient trop équilibrées. Et dans la propre bande de Bobby Carter alors ? Difficile à imaginer. Même si le couteau est trouvé près du domicile d'un lieutenant de Colvin. Les hypothèses vont bon train. Le pub d'un adversaire de Colvin est pris à coups de cocktails molotov. Une station de taxis subit aussi quelques dégâts. Dans Glasgow, la température grimpe.
C'est un vrai plaisir de retrouver Jack Laidlaw; Peut-être n'est-ce pas très objectif en fait. Il n'y a finalement eu que trois romans policiers avec ce personnage mythique qui a infusé dans toute la littérature polar Outre-Manche. Trois et donc un quatrième, ce préquel qui pose parfaitement le décor de ce Laidlaw frondeur, têtu, drôle souvent, bordélique sur son bureau, amateur de whisky Antiquary et peu doué pour les choses de la vie maritale. Rien que le noir peut sembler un peu court au regard des autres romans de McIlvanney mais encore une fois, peu importe. Ian Rankin a parfaitement rempli sa mission, ponctuant le récit de quelques scènes mordantes. Comme celle avec cette mémé qui sort de l'épicerie avec sa bouteille de gin ou encore cette visite de Laidlaw au troisième chef e clan, Matt Mason. Le caractère du flic fait toujours merveille.
William McIlvanney a imposé Glasgow sur la carte du roman noir, il a fait de la cité industrieuse, pauvre, religieusement partagée, une scène de crime gigantesque. Ce Rien que le noir est aussi un hommage, une façon de rendre la pièce à ce grand auteur.

Rien que le noir (The dark remains, trad. Fabienne Duvigneau), ed. Rivages, 240 pages, 20 euros
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