Littérature noire
12 Juillet 2022
Quatorze nouvelles dont la moitié avec les inspecteurs de la criminelle d'Amsterdam, De Gier et Gripjstra. Et une seconde rafale où les deux policiers sont en retrait voire carrément absents dans des histoires courtes qui vont du conte japonais (assez dingue !) à l'anticipation. Le chat du sergent reprend donc les deux héros surannés qui ont fait la renommée de Janwillem Van de Wetering (1973-2008) mais laisse aussi transparaître toute la riche personnalité de cet auteur, sans doute un peu oublié, incroyable bonhomme, véritable personnage de roman avec sa vie de bohème, depuis Rotterdam jusqu'au Maine, en passant par le Pérou, l'Australie.
Ces nouvelles, publiées à la fin des années 80, ont le délicieux goût des scénarios de "Hitchcock raconte". Quand le réalisateur de Psychose nous proposait en 30 minutes, une intrigue diablement ficelée, simple, tirée du quotidien. Dans Prière de faire suivre, par exemple, avec les deux inspecteurs juste en transparence, c'est l'histoire d'un jeune homme riche qui a décidé de supprimer son père avec l'aide de son meilleur ami gay et d'une amie sexy. Dans Une succulente friandise, c'est un auteur, retiré dans le Maine ("la renommée ? Qu'est-ce que j'en ai à faire ? Ecrire était un passe-temps agréable et les droits d'auteur continuent de me faire vivre mais j'ai atteint la dernière partie de mon existence. N'est-il pas grand temps de consacrer mes années de maturité à une activité qui en vaille la peine ?") qui se retrouve avec une très jeune mais encombrante groupie sur les bras.
Bien construit, le recueil propose bien entendu, dans ses premières pages, le meilleur de De Gier et Gripjstra. Ils n'affrontent pas la grande criminalité, les narco-trafiquants. Encore que, dans la nouvelle éponyme, les deux se retrouvent face à un caïd ventripotent. Le charme de ce duo d'enquêteurs, c'est une sorte de flegme, de patience mais aussi l'amour de leur ville (" Il y a du cognac dans ton café ?, demanda Gripjstra. J'aime beaucoup cet endroit. Admire ces poutres massives et vermoulues qui soutiennent un plafond enfumé. Jette un coup d'oeil au barman qui a une tête d'assassin et à cette horde d'alcooliques invétérés. N'est-ce pas qu'Amsterdam est une belle ville ?")
Pour tous ceux qui aiment les nouvelles, ce Chat du sergent est une superbe occasion de découvrir Van de Wetering, avec, in fine, l'envie d'en lire un peu plus.
Le chat du sergent (The sergent cat and other stories, trad. de l'anglais par différents traducteurs), ed. Rivages, 268 pages, 8 euros.