2 Décembre 2022
On peut remercier Deon Meyer de nous tenir informé régulièrement (chaque année en fait) de la situation en Afrique du Sud. Hyper violence, corruption de l'Etat, corruption des services de police... certes, il y en aura toujours pour lui reprocher de repeindre tout en négatif mais voilà, ce n'est pas du Paulo Coelho ou du Laurent Gounelle. Surtout, on pense à cette époque de la libération de Nelson Mandela, aux immenses espoirs entretenus, il est vrai, un peu naïvement, par les occidentaux. Comme si toutes les questions allaient se régler en un rien de temps.
Dans Cupidité, Griessel et Vaughn, avec une scène d'ouverture à la Michael Mann, se retrouvent au milieu d'un braquage, avant de passer en conseil de discipline pour une vieille affaire (cf : La proie en 2020). Et la sanction tombe : ils sont rétrogradés, virés de l'unité d'élite des Hawks, mutés dans un commissariat en périphérie du Cap. Mais finalement, ils s'en tirent bien en atterrissant à Stellenbosch, cossue ville à l'ouest du Cap, sur la route des vins. Et là, ils doivent s'occuper de la disparition inquiétante d'un étudiant, geek, spécialisé dans le hacking. Un enlèvement ? Que sait Rolster, un ami de la victime, cambrioleur connu dans le quartier ? En parallèle, Sandra Steenberg, jeune agente immobilière, doit faire face à la crise de son secteur. Elle est en retard pour le paiement de l'école de ses jumelles. En retard pour l'emprunt sur sa Ford. Et la banque la tanne pour le crédit de la maison. Alors quand cette ordure de Jasper Boonstra, milliardaire escroc, responsable en partie de la crise du secteur, l'appelle pour vendre son vignoble, elle sent la bonne affaire.
Deon Meyer est toujours très efficace dans ses histoires, il sait mettre du rythme, faire avancer ses intrigues, avec ce qu'il faut de tension, des dialogues courts, bien posés, des psychologies fouillées mais pas envahissantes et donc, toujours, ce sentiment de saisir un instant la réalité complexe de l'Afrique du Sud. On peut toutefois lui reprocher de ne pas assez creuser l'aspect social du pays. Il en a ici l'occasion avec la mère du gamin enlevé, pauvre femme sans ressources, totalement perdue. Mais ce n'est pas le style de Meyer. Il excelle ailleurs.
Cupidité est parfaitement dans la lignée des précédents opus de l'auteur, ouverture magistrale, construction au cordeau, flics honnêtes en proie au doute et une fin de western. On note même un clin d'oeil à David Joy, acheteur d'une arme à feu par correspondance. Cela sent la rencontre de fin de soirée, dans un établissement lyonnais...
Cupidité (Donkerdrif, trad. Georges Lory), ed. La Série Noire, 583 pages, 20 euros