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The killer inside me

Littérature noire

Six versions : un thriller qui change un peu, beaucoup

Difficile d'être encore surpris dans le domaine du thriller en 2023. Ce n'est pas que cela ne fonctionne pas mais les ficelles sont plus ou moins connues, on se laisse gentiment abuser, après tout il y a toujours cette sensation, ce petit frisson d'effroi, de mystère. Six versions réussit en revanche à vraiment prendre son lecteur par surprise. C'est peut-être béta mais l'idée de retranscrire un podcast fictif fonctionne à plein. Chaque auteur sait que le dialogue donne, par essence, de la vie, de la chair, à sa narration. Eh bien Matt Wesolowski, auteur du nord de l'Angleterre, ne se cache pas : il pose là, in extenso, les discussions d'un animateur, Scott King, avec les principaux protagonistes d'une affaire qui remonte à 1996. Le podcast date de 2016, supposément, mais les faits remontent à vingt ans plus tôt. Pendant l'été 96 donc, le jeune Tom Jeffries, 15 ans, disparaît dans les bois du mont Scarclaw. Il était dans une sorte de colonie, un peu hippie, avec quatre amis et ils passaient leur temps à marcher certes mais aussi à boire des coups et fumer des bédos. Bret, un soir tout le monde se couche déchiré et au petit matin, Tom a disparu. Mais vraiment disparu. Battues, hélicoptères, barrages.... rien. Et un an plus tard, le fils du propriétaire terrien le retrouve mort, la tête dans un marécage. Personne n'est interpellé, personne n'est inculpé. Gros mystère.
Scott King revient donc sur cette affaire qui a marqué l'opinion publique en son temps. L'adulte qui organisait ses sorties est ainsi interrogé. Une des filles du groupe d'ado. Un habitant du village voisin, atteint de troubles autistiques. Puis un des leaders de ce groupe d'ado, une seconde fille... bref les fameuses six versions annoncées.
Et le lecteur de découvrir que, finalement, la victime n'était pas si cool que ça. On a l'habitude, humaine, de se mettre du côté des plus faibles, des meurtris. Mais là, certains acteurs des événements ont tendance à dire " cela lui pendait au nez, à Tom".
Matt Wesolowski joue admirablement le trouble entre fiction et réalité, le côté parlé de son roman, les effets de réalisme par le subterfuge des hésitations, des excuses au micro, tranchent avec les témoignages d'une présence inquiétante sur les pentes du mont Scarclaw. Car tout le monde a vu une ombre, une créature en noir. C'est l'effet Stephen King. Comme il y a l'effet Kiss Cool chez certains. Le fantastique dans le quotidien, des visions que l'on ne voudrait confier à personne de peur d'être pris pour un fou. Cela fonctionne très bien ici et Six versions tient toutes ses promesses d'originalité et de chair de poule. Sans exagérations, avec une vraie mesure. On attend la suite de cette série, prévue en mars.

Six versions (Six stories, trad. Antoine Chainas), ed. Les Arènes, 311 pages, 14, 90 euros
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