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The killer inside me

Littérature noire

Florida : bal de requins dans le Miami des années 80

Miami, au mitan des années 80. Ah la belle époque des coupes mulet, du président Reagan, l'argent fou qui prend le pas sur la Guerre Froide. Bobby West en sait quelque chose : il est entré à la CIA pour faire tomber Castro, effacer le communisme de cette planète. Il n'est qu'un chef d'antenne en Floride mais il se sent investi et finance les opposants cubains installés là, à travers une société écran, qui rachète à tour de bras des commerces, des bureaux... la pompe à fric pour faire tomber el barbudo. Les résultats politiques ne sont pourtant pas terribles, sa société accuse même de sévères dettes. Et voilà qu'un mafieux local, Alexander French, lui propose une collaboration : il blanchit les sommes énormes du trafic de cocaïne, il récupère le cash à hauteur de deux à trois millions, il prend son bénéfice et poursuit sa lutte. Bobby West, qui plus est, en plein divorce, ne se fait pas prier. C'était oublier Holly, sa fille de 17 ans, en pleine crise d'ado. Une nuit, avec un jeune cow boy venu de Savannah, elle vide le coffre de son père et tous deux s'enfuient vers le nord. Là, c'est la grosse panique pour Bobby West.
Avec Florida, à 40 ans, Jon Sealy, originaire de Caroline du Sud, publie en France son deuxième roman, après le très remarqué Un seul parmi les vivants (Albin Michel, terres d'Amérique). Le parti pris du polar est l'occasion pour lui de démonter les connivences entre la politique (en l'occurrence la CIA) et le monde du crime dans le seul but de faire tomber un dictateur communiste. Plonger dans les embrouilles de la CIA, ce n'est pas nouveau dans le roman noir mais cet angle floridien est franchement détonant. Il y a quelques moments de comptabilité tout à fait abscons pourtant le lecteur devine les superstructures financières, diablement complexes, pour parvenir à donner une vitrine respectable aux agissements de l'agence de renseignements. C'est pas joli joli. Le contexte des années 80 offre un saut dans le remps qui confirme que ce n'était pas forcément mieux avant !. Enfin Jon Sealy aborde un truc unique chez eux : la religion. Et ça aussi, c'est assez fascinant, entre le vieux détective privé chargé de retrouver Holly, le jeune cow boy, fils de pasteur, la question de Jésus est très présente, au point de faire douter les personnages de leurs choix. Sans pour autant qu'ils soient de fiévreux pratiquants. Ils s'interrogent sur le sens de leur vie et l'abandon de la foi.
Florida se perd parfois dans des circonvolutions, multipliant peut-être un peu trop les personnages secondaires, mais il y a le plaisir d'un polar différent, sous le soleil et la moiteur de Miami, au volant de vieilles Chevrolet Impala, à attendre un fax...

Florida (trad. Mathilde Helleu), ed. Les Arènes, 427 pages, 22 euros
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