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The killer inside me

Littérature noire

La messagère : l'empoisonnement final de la planète

La puissance des bons romans d'anticipation est de nous faire parfaitement saisir des choses que l'on commence seulement à ressentir. Pas vraiment Cassandres non, mais des alertes tout aussi réalistes que poétiques. C'est bien le cas de La messagère qui convoque autant la catastrophe industrielle, et donc écologique, que l'anthropomorphisme, tout cela noué autour d'une intrigue à peine futuriste.
Il y a un demi-siècle, l'Homme a découvert que le minerai désigné sous le nom de "fantôme", agrégat d'hydrocarbures semi-fluides, trouvé dans le sous-sol canadien, pouvait désormais être extrait et mis à profit. L'exploitation va ravager des milliers d'hectares sur plusieurs centaines de mètres de profondeur. Fait unique, l'épicentre de cette activité minière, River Meadows, est désormais sujette à des "trébuches", des décohérences, quand une onde passe à travers les humains et les bâtiments, créant un vertige, une bulle. La famille Hewitt s'est installée là un peu par hasard mais le père a vite compris l'avantage financier à travailler pour ce consortium. Trois ans après, un accident catastrophique entame le début de la fermeture du site.  Lorsque toute la population sera finalement évacuée, des phénomènes inexpliqués vont continuer de se produire. Les autorités interdisent toute intrusion. Une église bien frappée se met à fréquenter les lieux. Alex Hewitt revient sur place des années plus tard pour chercher sa soeur perdue lors d'une expédition dans la zone fermée.
Claire, elle, sous couvert d'écrire des guides touristiques, participe aussi à de la contrebande d'animaux en voie d'extinction. Elle se rend sur une île du Nord pour livrer un mystérieux colis mais son séjour est chamboulé par une grue, une femelle, qui vient nicher sur son balcon de l'hôtel. Le phénomène est exceptionnel au point que le chef religieux local, mystique, vient lui rendre visite.
Dans un autre futur proche, un oiseau raconte l'odyssée de sa race en compagnie d'une humaine : la soeur d'Alex Hewitt.
Troublant, sensible, alarmant, La messagère bouscule le lecteur habitué aux codes du roman noir mais séduit par la profondeur du propos et par l'intelligence de la narration. Thomas Wharton a l'habitude jouer sur ce terrain à la fois de l'exploitation des sous-sols et des histoires imbriquées. Il est donc parfaitement à son aise ici et livre un roman obscure et pessimiste.

La messagère (The book of rain, trad. Sophie Voillot), ed. Rivages, 459 pages, 23 euros
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W
Arf, très envie de stretcher la PAL pour lui réserver une place de choix, mais je crains qu'il ne réveille de trop mon éco-anxiété.. Chouette billet en tout cas !
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T
J'adore lire les auteurs qui s'emparent de ce problème d'écologie, quelque part ça valide, si besoin, nos sensations, ces sentiments de vivre au bord du gouffre.