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The killer inside me

Littérature noire

Le guide : derrière les beautés du Colorado...

Cela peut paraître curieux avec une couverture pareille, avec ce titre et même avec Peter Heller - même si on lui doit la très sombre Constellation du chien - mais, avec Le guide, voilà un sacrément bon roman noir. Très inattendu, très original. Même s'il a quelque chose de La rivière de sang, de Jim Tenuto : un endroit de rêve dans le Colorado, la pêche à la mouche et tout qui part en vrille.
Jack est un jeune homme, grandit dans le ranch familial, qui a perdu sa mère dans un accident à cheval il y a quelques années et a assisté à la mort de son meilleur ami il y a une poignée de mois. Secoué, il a décidé de s'éloigner des veaux et des vaches pour travailler comme guide de pêche, loisir dans lequel il excelle depuis sa prime enfance. Il vient de prendre ses fonctions dans un lodge pour ultra-riches à l'Est de Denver et sa première cliente est une chanteuse Allison K. Le gérant du lodge l'a bien alerté sur les limites de pêche, les propriétés voisines inviolables, il n'empêche que pour quelques mètres de trop, le jour suivant, un plomb lui passe à quelques centimètres. Plutôt radicale comme réaction ! Tandis qu'il se lie un peu plus que d'amitié avec Allison, il remarque une caméra sur le pont qui enjambe la rivière. Il en trouve une autre dans sa chambre. Puis constate que les autres clients, croisés aux repas, ne semblent pas forcément là que pour la taille des truites.
Il faut être clair : tout le talent de Peter Heller réside dans sa capacité à nous faire sentir l'émotion d'une partie de pêche à la mouche. Le choix du leurre, la beauté de la rivière, le jeu des ombres, la patience, le froid de l'eau, la chaleur dans le dos, puis le combat avec le poisson, l'art de ne pas le perdre... et le plaisir de le relâcher. Parce que lorsque vous payez 50 000 dollars la semaine, ce n'est pas une truite en papillote qui vous attend au diner. Donc, oui, ces pages de pêche sont absolument somptueuses, un exercice contemplatif qui n'est pas vain puisqu'il vient se fracasser sur les actions de l'Homme et, en l'occurrence, en pleine pandémie, un trafic d'enfants immunisés.
En 300 pages, l'auteur réalise un crescendo impeccable, naviguant entre les merveilles de cette nature du Colorado et les projets moins gracieux des propriétaires des lieux, d'un détail à l'autre, le doute s'installe chez Jack mais aussi chez le lecteur. Paranoia ? Effets secondaires de la pandémie ? Le guide propose ainsi du nature-writing à la sauce polar, avec un final tout en calibre et course-poursuite. Peter Heller joue la carte de l'originalité tout en s'appuyant sur les codes du genre. Une lecture qui rafraîchit.

Le guide (The guide, trad. Céline Leroy), ed. Actes Sud, 301 pages, 22, 30 euros
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