Littérature noire
6 Avril 2024
Quand Jo Nesbo tourne à vide. Autant son dernier roman Leur domaine et surtout le recueil de nouvelles De la jalousie avaient montré un auteur capable de se réinventer en s'écartant du thriller basique façon Harry Hole, autant ce Rat Island le voit retomber dans ses travers. Cinq nouvelles et pas une à sauver.
Dans la première, il imagine sans grande originalité une pandémie et un ultra riche réfugié sur son île infestée de rats pendant que son fils psychopathe, en manque de reconnaissance du père (originalité au carré), kidnappe la fille de son meilleur ami. Entre survivalisme et dialogue moraliste, sur le bien, le mal, c'est très long.
Le lecteur passe à La déchiqueteuse et là aussi lourde morale autour d'un médecin type Didier Raoult qui a inventé un médicament qui offre rien moins que l'immortalité. Mais pris de remords, et parce que c'est un bon gars, il ne veut pas donner la formule au labo : " ma mort serait une goutte dans la mer, tandis que, si je livrais cette formule, nous aurions un océan de sang. "
Jo Nesbo multiplie les caricatures de personnages, le méchant, le gentil, le très riche et l'artiste pauvre comme dans Les cigales, succession d'incohérences et de naïveté confondante (la jeune fille explique qu'elle a fui un mariage forcé au Kirghiszistan et le jeune anglais de demander "pourquoi ne pas porter plainte et demander la protection de la police ? "). Le tout avec un romantisme qui ferait passer Katherine Pancol pour une punk.
Bref, tout cela est extrêmement décevant sur le fond et la forme et, encore une fois, renvoie aux ultimes épisodes assez lourds de la série Harry Hole.
Rat Island (Rotteova og andre fortellinger, trad. Céline Romand-Monnier), ed. La série noire, 431 pages, 21 euros