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The killer inside me

Littérature noire

L'ours de Californie : le serial-killer, la jeune fille et les donuts

Jack Queen est un peu dans la panade. Certes il vient de sortir de prison, il a été innocenté mais il doit tout ça à un ex-flic, Cato Hightower qui l'implique maintenant dans un vague plan de chantage contre l'Ours de Californie, un serial killer des années 80, usé mais toujours dangereux. Non, ce que veut Jack Queen maintenant qu'il est dehors, c'est, forcément, revoir sa fille Matilda, qu'il a laissé aux bons soins de sa belle-soeur et son beau-frère. Mauvaise surprise : sa fille est en oncologie, soignée pour une leucémie. Mais elle garde paradoxalement la forme et, passionnée d'enquête, a rouvert le dossier d'accusation de son père. Et celui sur l'affaire de l'Ours de Californie. Parce que oui, voilà que le plantigrade refait parler de lui : un producteur veut lui consacrer une série. Et, en même temps, des citoyens se font agresser selon son vieux modus operandi.
Duane Swierczynski pourrait raconter la recette des endives au jambon que la planète entière se mettrait à en manger ! Il a une façon bien à lui de rendre ses polars aussi drôles que touchant, bousculant ses anti-héros, prenant à rebrousse poil les clichés. Cette fois, il s'est particulièrement penché sur le cas des serial killer, façonnant un Ours de Californie, sadique mais con comme une pioche, harcelé par sa femme qui lui impose un régime. Pauvre homme. Hightower n'est pas mal non plus dans le genre loser qui finit la tête sur la moquette du motel. Les hommes ne sont décidément pas à la fête puisque que même Jack Queen et sa dégaine de père fragile en prend pour son grade. Non, dans L'ours de Californie, comme avec Serafina de Canari ou Audrey de Revolver, c'est une fille, Matilda cette fois, qui montre le plus de courage et d'intelligence. Et c'est ce qui fait tout l'intérêt, toute l'originalité de ce polar qui, pour la première fois chez Swierczynski, ne se passe donc pas à Philadelphie mais à Los Angeles.
Dans une narration, pour le coup, classique, cloisonnant les pensées et les actions de chaque protagoniste (mais en jouant avec l'Ours), l'auteur de The Blonde déroule une petite critique sur cette mode hollywoodienne qui, à travers ses séries, dresse des portraits quasi flatteurs de tueurs en série monstrueux. En remettant les femmes au coeur de L'Ours de Californie, Swierczynski recadre un peu les choses, redonne un semblant d'existence aux premières victimes de ses détraqués.
Mais L'ours de Californie c'est aussi un roman plus personnelle pour l'auteur qui y a mis beaucoup de lui-même et encore plus de sa fille, tragiquement disparue il y a sept ans. Il l'explique simplement en postface et, il est vrai, que tout prend aussi une autre dimension. Duane Swierczynski raconte avoir douté de terminer un jour ce texte. Il faut juste espérer que ce story teller touche à tout (scénariste de comics, partenaire de Anthony F. Zuiker sur la série hybride Level 26) continue de creuser ainsi cette veine de romans noirs entre l'entertainment et la critique sociale.

L'ours de Californie (California bear, trad. Sophie Aslanides), ed. Rivages, 426 pages, 23 €
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Y
Avant de lire la postface, j'avais l'impression d'être dans un épisode Scooby-Doo, ce qui ne m'excitait pas plus que ça. Après la lecture de la postface, j'ai évidemment vu le roman d'un oeil différent sans pour autant accrocher.
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T
Ah Scobby Doo il en a influencé des auteurs ! Je connaissais un peu l'histoire de Swierczynski et donc le personnage de la jeune fille m'a parlé très vite. Je concède que ce n'est pas son meilleur.