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The killer inside me

Littérature noire

Après nous le grabuge : Jim Thompson manie l'acide dans ses nouvelles (26)

Jamais Jim Thompson n'eut le bonheur de connaître un véritable succès. Ecrivain foisonnant, ni sa collaboration avec Stanley Kubrick, ni celle avec Sam Peckinpah, ni même les très bonnes retombées de The killer inside me ou Pottsville 1280 habitants, ne l'ont confortablement installées. C'est au début des années 50, qu'il s'est finalement senti le mieux, entre quelques bonnes critiques, le writer's project... Après nous le grabuge, écrits perdus (1968-1977), sur la fin de sa vie, est un recueil de nouvelles inachevées, non publiées, exceptée celle qui donne le titre à l'ouvrage, illustrant les difficultés de Big Jim alors que sa carrière est derrière lui : il écrit, il pond des pitchs qu'il envoie aux éditeurs, dans l'espoir de décrocher le gros lot. Et si ceux-ci aiment, il développe, pour faire un roman. Thompson a beaucoup donné dans la nouvelle puisqu' à l'époque il était assez facile de trouver un créneau et le Hithcock Magazine en a d'ailleurs publié plusieurs. Ici, le fan de l'écrivain d'Anadarko, Oklahoma, trouvera l'essence du romancier : des personnages misanthropes, des femmes irrésistibles mais compliquées, dans une société de faux-semblant, des personnages qui tous, ou presque, portent un masque, celui de la respectabilité, pour mieux cacher des vices. Avec, au-dessus de tout cela, une vraie tension sexuelle. Un cheval dans la baignoire du petit commence plutôt bien, avec ce jeune Herbie, d'intelligence supérieure, qui s'en prend à sa pauvre mais sexy belle-mère de quelques années son aînée. Nouvelle qui se termine dans un délire de méchanceté pas forcément très compréhensible. Mais bon, c'est inachevé. Le chaton roux, deuxième nouvelle, introduit un détective privé et sa femme Myra (comme dans Pottsville !), avec une sombre histoire d'héritage. Idem, inachevée.  Une esclave à la cave prend une autre tournure, avec une violente charge contre la bourgeoisie américaine, la bien pensance et les masques de la bonne société. Là, on retrouve le grand Jim Thompson social et cynique, celui de Hallali, Le criminel ou bien sûr Pottsville. Un texte génial... en six pages.  Lever de soleil à minuit tourne autour d'un journaliste, de sa femme prostituée et d'un flic pervers. Le triangle thompsonien parfait pour étudier les moeurs de Los Angeles. Pas convaincant pour autant. Enfin, Après nous le grabuge (adapté au cinéma avec Billy Zane): un frère et une soeur jumelle. Des pervers encore, des arnaqueurs et le garçon, Marty, beau à tomber, qui a des élans pour sa soeur qui ne sont pas sans rappeler les situations incestueuses du futur Rage Noire.

Un recueil pour les fans hardcore de Jim Thompson : il n'y montre pas un grand génie mais il y a encore des étincelles incroyables et une violence totale dans sa plume. On sent une vraie acidité dans le propos de l'auteur, on sent le vieil homme en colère, non seulement contre sa situation mais aussi celle des Américains. Ce n'est pas une attitude politique mais l'attitude d'un écorché vif, d'un auteur qui écrit comme il vit, réellement.

Après nous le grabuge (trad. Michèle Valencia), ed. Rivages, 227 pages, 9 euros.
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