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The killer inside me

Littérature noire

Il était une fois... Shining : dissection du chef-d'oeuvre

Ce serait vraiment dommage, mais alors vraiment, de se priver d'un tel bouquin à moins de 10 euros, sur un film aussi dingue que Shining. Rockyrama vient de lancer cette collection Il était une fois... avec l'un des chefs-d'oeuvre de Stanley Kubrick et autant dire que l'on apprend beaucoup de choses dans les  pages de Delphine Valloire.
Bien sûr qu'elle a lu le classique de Michel Ciment autour de l'oeuvre du cinéaste new-yorkais, émigré en Perfide Albion. Mais elle est surtout allée chercher mille et une interviews au fil des années : des comédiens bien sûr, des assistants de Kubrick, du décorateur, de la responsable de la BO, du monteur et bien d'autres. L'ensemble fait corps, rend un hommage sincère au travail de Kubrick sur le roman de Stephen King.
D'ailleurs, suivant un fil chronologique, ce Il était une fois... démarre avec l'achat du roman. En fait les droits sont achetés par la Warner avant que le livre soit mis en librairie. Une double raison : Kubrick a vu Rosemary's baby et L'exorciste et veut son film d'horreur. Ou de terreur. Ensuite, le Carrie au bal du diable de Brian de Palma a été un carton un an plus tôt, donc il ne faut pas laisser passer le roman suivant de King. Inutile de rappeler que le réalisateur, avec la romancière Diane Johnson, a dépecé le livre pour le mettre en conformité avec ses objectifs et surtout sa vision.
Passé un chapitre saisissant sur la recherche d'hôtels gothiques aux Etats-Unis, leurs reconstructions dans les studios anglais, Delphine Valloire aborde le casting. Si l'auteur du roman voyait John Voight dans le premier rôle, Kubrick, lui, a depuis longtemps porté son choix sur Jack Nicholson. Au moins depuis Easy Rider et Vol au-dessus d'un nid de coucou. Pour Danny, l'assistant du réalisateur, Léon Vitali, va voir 5000 enfants, pendant cinq mois ! Le choix de Shelley Duvall, comme épouse de Nicholson, s'est effectué sur la fragilité mais aussi la carrière de la jeune comédienne. A ce propos, celle-ci a récemment démenti, sur Twitter, avoir été traumatisée par le tournage de Shining. Elle admet qu'il a été très dur mais, par exemple, pour la scène de la batte de base-ball, on déclare souvent que le plan a été tourné plus de 120 fois, elle, affirme, qu'il s'agissait d'une soixantaine de prises. Ce qui est déjà énorme. Et c'est aussi le coeur de ce livre : la maniaquerie de Stanley Kubrick. Cette volonté de jouer et rejouer les mêmes scènes, sa façon de dire " c'était très bien. On la refait ". Au point de faire craquer certains. Pas étonnant alors que le tournage, prévu sur 18 à 20 semaines, se soit allongé sur 46 semaines, de mai 78 à avril 79. Retardant ainsi les tournages, dans ces mêmes studios, de L'Empire contre-attaque et Les aventuriers de l'Arche perdu d'un Spielberg qui deviendra un authentique ami du réalisateur de Lolita.
Le chapitre sur le travail pour la bande originale est aussi fou que fabuleux. On y lit que Wendy Carlos, déjà l'oeuvre sur Orange Mécanique, a bossé des mois avant que le réalisateur ne se tourne vers l'oeuvre du compositeur polonais Krysztof Penderecki et c'est Gordon Stainforth, l'assistant du monteur titulaire, blessé, qui va mettre au point la subtile horlogerie de cette BO, collant à chaque scène, chaque mouvement de caméra. C'est là que va se décider l'idée géniale du "Midnight the stars and you", morceau fox trot des années 30 pour illustrer la fameuse scène de la Golden Room.
Mais le génie de Kubrick, c'est aussi sa modernité, avec l'utilisation, novatrice, de moniteurs pour surveiller les cadrages mais surtout la steady cam de Garret Brown, vraie invention, prépondérante dans ce film-là.
Il était une fois... Shining fourmille d'anecdotes mais surtout d'infos passionnantes, par exemple, sur la première fin proposée lors de la sortie aux Etats-Unis, finalement supprimée par le maître lui-même. C'est peu de dire que le travail de collecte est conséquent et sans doute quasi-exhaustif. La preuve, c'est qu'après lecture, vous n'avez qu'une hâte c'est de revoir ce film pour la millième fois.

Il était une fois... Shining, ed. Rockyvision, 105 pages, 9.90 euros
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