Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
The killer inside me

Littérature noire

Eliminatoires : Jim Thompson réussit un joli mix de ses précédents romans (20)

Eliminatoires : Jim Thompson réussit un joli mix de ses précédents romans (20)

Ouf ! On a tremblé l'espace d'un livre et ce drôle de Texas par la queue. Mais il faut croire que Big Jim était en panne en cette année 1965. Parce que quelques mois plus tard, Rage Noire, s'est révélée en fait une de ses meilleures bombes. Il y a des passages à vide, même chez les légendes. Et puis, pour notre plaisir de lecteur jamais satisfait, il y a cet Eliminatoires (Wild Town, en VO, ça sonne plus cool !), paru en 1957. Dingo McKenna n'est pas le mec le plus verni de la planète. C'est un costaud qui se met toujours dans de drôles de situations, qui se retrouvent en taule pour des bêtises. C'est surtout un bonhomme droit et têtu. Quand il arrive à Loqueville, à l'ouest du Texas, il tombe sur le chef de la police, Lou Ford. Et sur une gonzesse épatante, Joyce... Vous vous dites, j'ai déjà lu ça ?

Quand même ! Oui, ce sont des personnages déjà présents dans l'oppressant L'assassin qui est en moi : Lou Ford y était déjà shériff, Joyce, femme fatale. On va se dire que Jim Thompson ne se foule pas trop pour ses personnages. Ce n'est pas faux. Et puis l'intrigue d'Eliminatoires se situe dans un hôtel, déjà évoqué dans Un chouette petit lot. Vous l'avez compris, Big Jim nous fait un mix à sa façon. Et c'est très bon, très drôle.

Dingo devient le chef de la sécurité d'un hôtel, tenu par un riche pépère en fauteuil roulant qui a fait son beurre dans le pétrole. Un soir, devant les yeux de Dingo, le comptable de l'hôtel passe par la fenêtre. Et 5 000 dollars manquent dans la caisse. Immédiatement, notre pauvre garçon reçoit une lettre de chantage... Forcément, cela vient d'une des trois femmes de ce patelin. Mais laquelle ? Histoire complexe, bourrée de tiroirs qui ne se referment jamais, Eliminatoires est surtout une de ces bonnes souricières dont Thompson a le secret. Des femmes qui séduisent des hommes qui font pression sur d'autres femmes. Dans une petite ville de province. Qui a empoisonné le comptable avant qu'il ne se défenestre ? Qui a piqué le fric ? Lou Ford est absolument infect, gluant, avec son éducation de fils de médecin, manipulateur, autoritaire. Un vrai poison comme on les aime.

Surtout, Jim Thompson fait feu de tout bois, dans sa misogynie (" Mâle ou femelle, il fallait avoir tué père et mère pour venir chercher du travail à Loqueville. Et Joyce - pour l'appeler par son nom - avait probablement passé plus de temps sur le dos qu'il n'en avait passé sur ses pieds... "), son dégoût des Texans, son mépris même de l'écriture. Jim Thompson virevolte, ne s'embarrasse pas trop de vraisemblances, perd son lecteur. Comme d'habitude, Eliminatoires n'a pas de héros, juste des pauvres types, des pauvres femmes, écrasés par la situation, le destin, les mauvais choix. Mais voilà, c'est la classe. Du roman noir old school pur jus.

Eliminatoires, Jim Thompson, édition Folio, 274 pages, 7, 50 euros.
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article