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The killer inside me

Littérature noire

L'île de silicium : demain, un monde encore plus pourri

C'est demain. Le centre de gravité économique de la planète a définitivement basculé du côté de la Chine. La démocratie n'a pas gagné. Au sud de l'empire du milieu, une petite île est le réceptacle de toute la merde plastique, électronique que le monde envoie trier. Les natifs de l'île de silicium sont soit des chefs de clans, soit les cadres de ces entreprises de tri et de recyclage. Les petites mains, les ouvriers, ceux que l'on appellent les "déchetiers" viennent du reste du pays. Sous -rémunérés, déconsidérés, humiliés, ils crèvent de maladies. Ou sous les coups.
Xiaomi est venue sur l'île de Silicium pour, comme d'autres, subvenir aux besoins familiaux. Elle loge avec Liu-Wen, un garçon rebelle, très au fait des différentes prothèses qui se perdent dans les poubelles.
Chez les puissants, Scott Brandle, un Américain, tente d'obtenit un marché de tri plus écologique, plus économique, pour les clans. Son traducteur, Dang Kai-Zong, est un natif de l'île mais il n'y avait plus mis les pieds depuis des années. En quelques jours, l'équilibre nauséabond des lieux va être renversé. Une prothèse infectée est testée sur un enfant. Puis sur Xiaomi. Chez cette dernière, la transformation est radicale, puissante, presque incontrôlable.
Chen Qiufan, qui est originaire d'une ville chinoise qui a fait des déchets son modèle de développement, maîtrise à la perfection sa narration, perdant le lecteur dans des délires oniriques où Xiaomi se dédouble, où la réalité fuit, où les perceptions s'affolent. L'île de Silicium est de la pure SF, avec cette science omniprésente, ce transhumanisme assumé ("la technologie développée par SBT avait transforméle commerce des prothèses en une activité comparable à celle des activités des applications mobiles, des chaussures de sport"), un environnement ultra-pollué et, dans une Chine pourtant si pragmatique, des croyances ancestrales. Tout cela fonctionne à merveille et paraît juste une excroissance, une boursouflure, de notre monde présent. Certes, il y a ces pages un peu longues de la transformation de Xiaomi. Mais le dernier tiers du roman se révèle d'une belle efficacité, dans une ambiance de typhon et de fin du monde. Bien angoissant.

L'île de silicium (Waste tide, trad. Gwennaël Gaffric), ed. Rivages Imaginaires, 441 pages, 23 euros
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