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The killer inside me

Littérature noire

Un solide double shot de SF avec les novellas du Bélial

Une heure Lumière est maintenant une collection de novellas bien connue, riche d'un catalogue dans lequel les fans de SF vont puiser avec gourmandise. Pour l'amateur de romans noirs, c'est un peu le Rubik's Cub :, on ne sait pas trop comment aborder les titres, par lesquels démarrer. C'est donc le blog L'épaule d'Orion qui a gentiment joué les éclaireurs avec ces deux titres, très différents mais incroyablement fouillés malgré leurs 100 ou 130 pages, deux titres également engagés.


L'homme qui mit fin à l'histoire (The man who ended History : a documentary, trad. Pierre-Paul Durastanti), 100 pages, 8, 90 euros.
La novella commence par une démonstration de physique, que le candide imagine très précise, très pertinente mais qui, évidemment, perd un soupçon le lecteur dans ses démonstrations. Mais tout va très bien parce que cela ne dure pas des pages et qu'il y a un réel intérêt : le professeur Akemi Kirino, américano-japonaise, a mis au point un processus pour voyager dans le temps. Seul inconvénient : les périodes disparaissent, leurs photons étant rayés de l'univers. C'est en revenant de la projection d'un film sur les atrocités de l'Unité 731, pendant l'occupation de l'empire japonais en Mandchourie, qu'avec son mari, historien, elle décide d'offrir ces voyages dans le temps à des particuliers qui veulent avoir des réponses sur leurs ancêtres disparus lors de cette horreur. Parce que le Japon moderne a toujours détourné les yeux de cette époque. Parce que les Américains ont utilisé les données récoltées par les médecins au cours de ces expériences inhumaines. Et parce que, finalement, aujourd'hui, la Chine, victime à l'époque, n'est pas trop fréquentable. L'expérience du couple apporte des réponses aux citoyens qui voyagent mais crée un trouble diplomatique profond. Que faire de son passé ? A qui appartient-il ? Le Japon actuel, par exemple, est-il complice de l'empire qui l'a précédé ?
L'homme qui mit fin à l'histoire, dans une narration qui emprunte au documentaire, avec différents intervenants, différents médias, soulève des questions puissantes et permet au lecteur occidental de se (re) familiariser avec cet épisode inhumain d'un conflit qui allait se poursuivre avec la Seconde Guerre Mondiale.

Rossignol, 130 pages, 10, 90 euros.
Une ambition phénoménale. Un vocabulaire dingue. Un vrai trouble de lecture. Rossignol, sorti ce printemps, est une drôle de claque. Et il faut se sentir prêt à l'accueillir. Parce que les trente premières pages installent le lecteur dans cette Station, en dérive dans l'espace, occupée à capter des astéroïdes pour les forer et en retirer les minerais essentiels. Là, vivent, des espèces venues de toute la galaxie et peut-être de plus loin : des Humanias - ceux qui nous ressemblent le plus - , des Has, des Marith rouge, des Rexlos, des Vahakyas, des Aqsanas... certains ont des écailles, d'autres des plumes, certains sont des amas de boules mais tous parviennent à vivre sur la Station. Sauf que, désormais, celle-ci se divisent entre les Spéciens, partisans d'un arrêt des hybridations de races et les Fusionnistes, plutôt pour que les choses demeurent. Dans ce grand Babel intersidéral, Freyja est une jeune maman Humania qui aimerait ne pas prendre position : sa mère l'abrutit de remarques sur son piètre ADN mais elle trouve son bonheur auprès de son fils, auquel elle chante la fameuse "A la claire fontaine"...
Rossignol déboussole, possède quelque chose de franchement vertigineux. Le monde imaginé par l'autrice Audrey Pleynet est d'une richesse sans fin, les interactions sont finement exposées, la lutte de pouvoir est complexe, faite de coups bas, et de coups pas forcément imaginables dans notre XXIe siècle. Ainsi tout se passe dans les esprits, que l'on soit télépathes ou pas. Et ça, si c'est une riche idée, elle aurait aussi pu plomber la novella. Mais pas du tout : Audrey Pleynet maîtrise. Et distille une problématique tellement actuelle.

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J
Deux excellents volumes. Et amateur de polar comme toi, je ne peux que conseiller :<br /> Vigilance de Bennett, la trilogie de La maison des jeux de Claire North, et un pont sur la brume de Kij Johnson
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T
Merci Jean-Marc<br /> je ne vais pas m'y replonger immédiatement mais je note parce que cela fait un bien fou de tordre un peu le cou aux habitudes de lectures.