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The killer inside me

Littérature noire

Plan américain : Greenland raconte son New-York des 70's

C'est un livre sur la jeunesse. Sur les rêves de cinéma. Mais avant tout sur New-York et le New-York de la fin des années 70, début 80, celui du Studio 54 et du CBGB, une ville pas vraiment bien fréquentée, même un peu glauque, sale. Pourtant bourrée d'énergie, de créativité. Et Pablo Schwartzmann, la vingtaine, en est le pur produit. Fils d'un commerçant en mercerie, habitant du Lower Manhattan, du côté de Bowery, il se lance dans le cinéma. Enfin, il aimerait se lancer. Pour tout CV, outre un diplôme de Septième art à la NYU, il a une vague récompense pour un court métrage de fin d'études. Donc, dans l'attente du bon plan et du point final à son scénario sur Cicéron, il écrit des chroniques de films X pour un magazine porno. A l'occasion, il fait quelques interviews. Un soir, dans un cabaret, il retrouve son ami de jeunesse, Jay Greenland (voir Mécanique de la chute), futur héritier d'un empire immobilier. Au terme de leur première discussion, Jay fait connaître son goût pour l'art à Pablo et incite ce dernier à écrire un scénario, type blaxploitation, mais avec une vraie originalité, une dimension artistique. Fou de Godard et de Truffaut, Pablo démarre au quart de tour et exige de réaliser ! Entre-temps, il fait un mariage blanc avec son amie sud africaine Kit et Jay tombe amoureux d'Avery, superbe comédienne black. Tous ensemble, ou presque, ils vont tenter de produire et tourner un film qui, ils en sont certains, marquera l'histoire.
Plan américain est un prequel de Mécanique de la chute et conserve la question raciale sans la placer toutefois au coeur du récit. Seth Greenland est un auteur d'une grande finesse sous ses airs de grand blagueur : il parvient à rappeler la grande liberté de penser et d'expression de cette époque, voire le côté révolutionnaire de certains artistes. Et un des comédiens de Plan américain, clin d'oeil à l'époque actuelle, de lancer : " la comédie meurt un peu à chaque fois qu'on se demande ce que vont penser les gens ". Pablo qui poursuit son rêve, c'est benoîtement, l'Amérique de tous les possibles... quand on a un ami riche et ambitieux. L'auteur, avant Mécanique de la chute, avait pris l'habitude de faire hurler de rire ses lecteurs avec les extravagances de ses personnages (il faut lire Un patron modèle). S'il s'est, on peut le regretter, relativement calmé de ce côté-là, il parvient encore à écrire des scènes tordantes comme celle où la rédactrice en chef du magazine porno demande à Pablo un article d'essais sur des vibromasseurs. Il y a ainsi un peu de Woody Allen dans ce roman, avec un personnage principal toujours plus ou moins à côté de ses pompes, jamais vraiment à l'aise avec les filles, terrorisé (qui ne le serait pas ?) par les caïds russes.
Bref Seth Greenland poursuit une oeuvre américaine pétillante, intelligente et s'offre ici un léger bol de mélancolie.

Plan américain (Bleecker and Bowery, trad. Adélaïde Pralon), ed. Liana Levi, 302 pages, 22 euros
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