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The killer inside me

Littérature noire

L'homme qui vivait sous terre : Platon is black

C'est un conte dont il faut avoir les clés. L'homme qui vivait sous terre est rempli d'idées, politiques certes, mais également philosophiques, sociétales. La bonne idée des éditions Bourgois, qui publient ce roman inédit, base d'une nouvelle qui avait fait grand bruit dans les années 40, c'est d'avoir offert une postface au petit-fils de Richard Wright, Malcolm, qui peut expliquer, détailler, mettre en perspective.
Pour faire simple, Fred Daniels est un jeune homme noir interpellé par trois policiers alors qu'il sort d'une propriété où il vient, comme à son habitude, de tondre le gazon et de faire quelques menus travaux. Accusé d'un double homicide dans une maison voisine, il nie avant d'être torturé et de se voir forcé de signer des aveux. Alors que les policiers l'emmène voir, une dernière fois ?, sa femme enceinte, ils sont forcés de la conduire à l'hôpital pour accoucher. Fred Daniels en profite pour s'enfuir et se réfugie dans les égouts. Depuis les tunnels sombres et puants il observe les hommes, la société, vole une radio, un hachoir à viande, ouvre un coffre, subtilise des diamants...
Assez rapidement, l'ancien élève de philosophie qui sommeille en chacun de nous se souvient de l'allégorie de la caverne de Platon, le principe de réalité, l'acceptation de celle-ci. Le génie de Richard Wright, c'est bien d'appliquer le concept à la condition des afro-américains mais pas seulement. En bon communiste, et c'est là qu'il faut lire la bio de l'auteur, celui-ci propose un renversement des valeurs de la société US, Fred Daniels mettant au clou un revolver qu'il vient de voler, utilisant l'argent pour décorer la grotte qu'il s'est trouvée... bref l'american way of life à la sauce Lenine. Et comme Wright n'est pas non plus un utopiste des salons germanopratins, puisque, lui, a vécu le pire dans sa jeunesse, il offre une fin douloureuse, violente qui indique, sans doute, que son rêve d'émancipation, ou d'égalité, fait long feu.
Aux côtés de Toni Morrison, ou James Baldwin, Richard Wright a aidé à donner de la visibilité, de la crédibilité  et à faire entendre la voix des afro-américains. Un auteur majeur pour saisir ce qui se passe encore aujourd'hui aux Etats-Unis.

L'homme qui vivait sous terre (suivi de souvenirs de ma grand-mère, The man who lived underground, trad. Nathalie Azoulai), ed. Bourgois, 235 pages, 18 euros.
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