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The killer inside me

Littérature noire

Ah, les braves gens : entre strip tease et Groland

Drôle, oui. Et même goguenard, Ah, les braves gens, le dernier roman de Franz Bartelt est encore un sacré moment d'humour en cet automne littéraire plutôt sérieux. A la manière d'un anthropologue moderne, il va à la rencontre d'une France paumée, d'une campagne profonde, jamais trop définie, histoire de ne pas se prendre une polémique inutile sur le coin de la tête, mais le lecteur devine un peu que c'est le centre de la France, "depuis un moment, j'avais l'impression de m'être égaré au milieu des champs de betterave et de maïs".
L'histoire est à la fois simple et alambiquée. Julius Dump, écrivain raté mais qui persiste avec un flegme méritant admiration, découvre que son père un tueur de premier ordre. Et qu'il a notamment participé au cambriolage périlleux et meurtrier d'un tableau mystérieux apparemment très recherché. Sur quelques vieux documents, il retrouve la trace de cette toile qui le mène donc à Puffigny, trou du cul de la France, peuplé de gens qui se cartonnent au bistrot de la Gare et de filles qui se font tamponner à la fête foraine. Dump va se payer les services d'un détective privé en déshérence et rechercher un personnage intrigant sans doute enterré sans plus de cérémonie dans la fosse commune locale. Et Puffigny est un peu en ébullition après la disparition d'une fille du village. A quoi s'ajoute la présence d'un curieux bonhomme qui semble lui aussi rechercher le tableau.
Il y a du grotesque dans Ah, les braves gens, des habitants caricaturaux, que ce soit le maire, le Polnabébé ou le patron de bistrot. Mais il y a aussi une humanité simple, autour d'un godet, la vie de village, dénuée de tout artifice, des existences loin de tout, bien obligées de se contenter du peu qu'il reste. Oui Franz Bartelt est cruel, pas méchant, mais cruel. Il ne tombe pas dans le mépris de classe et se moque d'ailleurs, le premier, du métier d'écrivain. C'est donc finalement très agréable, souvent complètement barré, un peu long dans le coeur du roman, mais toujours assez comique entre des situations loufoques ou des dialogues irrésistibles. Et puis c'est la vision, certes exagérée, mais authentique d'une France avec ses croyances, ses convictions, ses énormes défauts (le mensonge, le dénigrement systématique). Tout lecteur s'y reconnaîtra forcément sur quelques pages.

Ah, les braves gens, ed. Seuil, 280 pages, 19 euros
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W
très juste !
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C
Merci Wollanup