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The killer inside me

Littérature noire

Le monde de la berge fleurie : cravate péruvienne et maladie de Charcot

Pour balancer des romans de plus de 600 pages, c'est un peu comme dans le demi-fond, il faut savoir garder un rythme et avoir des appuis légers. Ce que n'a pas Atticus Lish avec Le monde de la berge fleurie, texte qui ne souffrirait pas de 200 pages de moins, ainsi que d'une vraie direction. Car, certes il s'agit, si on veut être large, d'un roman d'initiation, du jeune Corey, soumis, à ses seize ans, aux affres de la vie, mais le lecteur de ne sait pas si la leçon de vie va venir de la maladie de sa mère, de sa relation avec son voisin Tom ou encore de son amitié toxique avec Adrian. Voire, peut-être de la pratique des arts martiaux. Surtout que le roman vire, un instant, au polar.
Corey vit au sud de Boston, entre l'océan et les marais. Lycéen besogneux, il apprend que sa mère, Gloria, est frappée de la maladie de Charcot. Petit à petit, il se déscolarise, par son caractère colérique, par nécessité financière et puis aussi pour être au plus près de sa mère. Dans ce duo, apparaît le père biologique, homme tordu, vigile au MIT de Boston, prétendant être un expert en physique, un ex flic. Mais avant tout, un sale connard. Comme l'ami de Corey, Adrian, grande gueule, issu de la bourgeoisie bostonienne, passablement tordu, lui aussi, par ses parents. Personnages positifs, Tom est un contremaître, honnête, travailleur et père de la belle Molly, élève studieuse et sportive. Et puis il y a Joan, ex amoureuse de Gloria, venue prêter main forte à la maison.
Atticus Lish aurait pu tirer quelque chose de très touchant mais sa narration est trop souvent coupée par une foultitude de détails qui à force ne sont plus des détails mais des éléments : d'abord des paragraphes sur l'évolution de la maladie de Charcot et même si ça fait très Doctissimo, on peut comprendre, soit; et puis des lignes et des lignes sur les prises de jiu jitsu brésilien (si vous voulez tout savoir sur la cravate péruvienne !), des pages sur la physique, sur les drogues disponibles sur le campus de Molly, sans oublier la marque du vélo, la marque de l'attache vélo jusqu'aux chaussures Under Armour ! Impossible de se fixer sur l'histoire quand il y a également des " les essuie-glaces allaient et venaient sur le pare-brise; le clignotant faisait tic tac..."
On a parfois le sentiment que l'auteur ne veut pas jouer cette carte de la sensibilité avec Gloria et change de braquet pour évoquer le père, un personnage un peu caricatural de schizo. Surtout très inintéressant. Atticus Lish étant un ancien marine, il veut sans doute paraître viril. C'est une hypothèse. Ce qui est certain c'est qu'il veut que l'on sache que c'est un vétéran et donc, là encore, il termine le roman par des demi pages sur l'entraînement des Navy Seals... le lecteur passant en 600 pages d'un gamin qui lave sa mère dans la baignoire à une machine à tuer. Le fil est difficile à suivre. On pourrait aussi parler du choix du titre français.

Le monde de la berge fleurie (The war for Gloria, trad. Céline Leroy), ed. Christian Bourgois, 624 pages; 25 euros.
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