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The killer inside me

Littérature noire

Retour de flamme : c'est gris et même très noir à Glasgow

La ville demeure, en 2024 encore, une valeur sûre de la littérature noire. Peindre une cité, comme Joseph Knox par exemple avec Manchester, ou Boris Quercia avec Santiago, David Peace pour Tokyo, c'est l'assurance d'incarner le décor, de donner à toucher, à sentir aux lecteurs. Mais il ne faut pas se planter évidemment. Et Liam McIlvanney ne se trompe pas quand il évoque Glasgow dans les années 70. C'est vrai que la ville a été décrite plus d'une fois, par son père William, par Chris BrookmyreAlan Parks (il vient à Luri le 11 mai, vous le saviez) ou encore Denis Mina. Avec Retour de flamme et au gré de 580 pages, Liam McIlvanney parvient à tremper sa plume dans tout le camaïeu de gris de la ville désindustrialisée : prostitution, misère, urbanisme déglingué, alcoolisme et, forcément, grand banditisme. Tous les codes du polar sont réunis. Avec d'abord, cette figure centrale de l'inspecteur principal Duncan McCormack. La trentaine, il a fait tomber un ripou il y a quelques années et son retour à Glasgow est vu d'un très mauvais oeil par plusieurs collègues. Lui, s'efforce de masquer son homosexualité. Et se concentre avant tout sur la traque de Walter Maitland, caïd insaisissable de la ville. Tellement insaisissable que le patron de McCormack lui demande de s'occuper maintenant du cadavre que l'on vient de retrouver dans une décharge. Bingo ! Il s'agit d'un ancien député travailliste. En cet été 75, Glasgow paraît en surchauffe. Il y a eu cet incendie criminel contre le dépôt de whisky d'un clan rival de Maitland qui a fait quatre victimes collatérales, ce cadavre et maintenant un attentat à la voiture piégée.
Retour de flamme rassemble tout ce qui fait un bon polar, sans parler de clichés plutôt des recettes attendues, et l'auteur prend son temps pour alimenter chacun de ses tiroirs : de la collègue flic qui vit chez ses parents, au jeune garçon qui cherche à se faire un nom dans le gang, en passant par l'histoire sordide d'un orphelinat et toujours, cette population abandonnée, de la pute tombée dans les mains de la pègre à ce vieux monsieur qui observe sa rue sinistre depuis la fenêtre. Et on apprécie forcément ces quelques pages d'humanité dans les pubs, cigarettes au bec, " une pinte de Guinness avait quelque chose de simple et de parfait : le corps noir, la mousse d'un blanc laiteux, dépassant tout juste du rebord du verre. Laisse-la comme ça aussi longtemps que possible, telle était la philosophie de McCormack. Profite de ce moment de pureté. " McIlvanney écrit tout aussi joliment la relation de ce McCormack, avec une finesse, une sincérité qui donne une once d'émotion dans ce sinistre panorama. Oui parce que l'amour, ce n'est pas ce qui transpire vraiment du tableau final. Un tableau qui confirme un peu plus que Liam prend bien la suite de papa.

Retour de flamme (The heretic, trad. David Fauquemberg), ed. Métailié, 585 pages, 23 euros
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